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caveau la boîte où il repose. Ce Fakir eut la maladroite fantaisie de faire l’épreuve de sa mort et de sa résurrection devant la mission anglaise, lorsqu’elle arriva à Lahore. Mais les Anglais, avec une cruelle méfiance, proposèrent de lui imposer quelques précautions de plus : ils montrèrent des cadenas à eux appartenant, et parlèrent de mettre au tombeau des factionnaires européens. Le Fakir fit d’abord de la diplomatie ; il se troubla et finalement refusa de se soumettre aux conditions britanniques. Rundjet-Sing se fâcha. — Je vois bien, dit le Fakir au capitaine Osborne, que vous voulez me perdre, et que je ne sortirai pas vivant de mon tombeau. Le capitaine, ne désirant pas du tout avoir à se reprocher la mort du pauvre charlatan, renonça à l’épreuve. » Voy. Jamambuxes.

Farfadets, esprits, lutins ou démons familiers, que les personnes simples croient voir ou entendre la nuit. Quelques-uns se montrent sous des figures d’animaux ; le plus grand nombre restent invisibles. Ils passent généralement pour rendre de bons offices. Des voyageurs content que les Indes sont pleines de ces esprits bons ou mauvais, et qu’ils ont un commerce habituel avec les hommes du pays.

Voici l’histoire d’un farfadet : En l’année 1221, vers le temps des vendanges, le frère cuisinier d’un monastère de Cîteaux chargea deux serviteurs de garder les vignes pendant la nuit. Un soir, l’un de ces deux hommes, ayant grande envie de dormir, appela le diable à haute voix et promit de le bien payer s’il voulait garder la vigne à sa place. Il achevait à peine ces mots, qu’un farfadet parut. — Me voici prêt, dit-il à celui qui l’avait demandé. Que me donneras-tu si je remplis ta charge ? — Je te donnerai un panier de raisin, répondit le serviteur, et du bon, à condition que tu veilleras jusqu’au matin. — Le farfadet accepta l’offre ; et le domestique rentra à la maison pour s’y reposer. Le frère cuisinier, qui était encore debout, lui demanda pourquoi il avait quitté la vigne ? — Mon compagnon la garde, répondit-il, et il la gardera bien. — Va, va, reprit le cuisinier, qui n’en savait pas davantage, ton compagnon peut avoir besoin de toi. — Le valet n’osa répliquer et sortit ; mais il se garda bien de paraître dans la vigne. Il appela l’autre valet, lui conta le procédé dont il s’était avisé ; et tous deux, se reposant sur la bonne garde du lutin, entrèrent dans une petite grotte qui était près de là et s’y endormirent. Les choses se passèrent aussi bien qu’on pouvait l’espérer ; le farfadet fut fidèle à son poste jusqu’au matin, et on lui donna le panier de raisin promis. — Ainsi finit le conte[1]. Voy. Berbiguier, Bérith, Esprits, Feux follets, Hecdekin, Orthon, etc.

Farfarelli. C’est le nom qu’on donne aux farfadets en Italie.

Farmer (Hugues), théologien anglican, mort en 1787. On a de lui un Essai sur les démoniaques du Nouveau Testament, 1775, où il cherche à prouver, assez gauchement, que les maladies attribuées à des possessions du démon sont l’effet de causes naturelles, et non l’effet de l’action de quelque malin esprit.

Fascination, espèce de charme qui fait qu’on ne voit pas les choses telles qu’elles sont. Un bohémien sorcier, cité par Boguet, changeait des bottes de foin en pourceaux, et les vendait comme tels, en avertissant toutefois l’acheteur de ne laver ce bétail dans aucune eau. Un acquéreur de la denrée du bohémien, n’ayant pas suivi ce conseil, vit, au lieu de pourceaux, des bottes de foin nager sur l’eau où il voulait décrasser ses bêtes.

Delrio conte qu’un certain magicien, au moyen d’un certain arc et d’une certaine corde tendue à cet arc, tirait une certaine flèche, faite d’un certain bois, et faisait tout d’un coup paraître devant lui un fleuve aussi large que le jet de cette flèche. Et d’autres rapportent qu’un sorcier juif, par fascination, dévorait des hommes et des charretées de foin, coupait des têtes et démembrait des personnes vivantes, puis remettait tout en bon état.

Dans la guerre du duc Vladislas contre Grémozislas, duc de Bohême, une vieille sorcière dit à son beau-fils, qui suivait le parti de Vladislas, que son maître mourrait dans la bataille, avec la plus grande partie de son armée, et que, pour lui, il pouvait se sauver du carnage en faisant ce qu’elle lui conseillerait ; c’est-à-dire, qu’il tuât le premier qu’il rencontrerait dans la mêlée ; qu’il lui coupât les deux oreilles, et les mît

Le bonnet magique.


dans sa poche ; puis qu’il fît, avec la pointe de son épée, une croix sur la terre entre les pieds de devant de son cheval, et qu’après avoir baisé cette croix il se hâtât de fuir. Le jeune homme, ayant accompli toutes ces choses singulières, revint sain et sauf de la bataille où périrent Vladislas et le plus grand nombre de ses troupes.

  1. Cœsarius Heisterbacheensis ill. miracul., lib. V.