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tir par leurs prestiges la vérité des miracles que Dieu faisait par l’organe de Moïse[1].

Jarretière. Secret de la jarretière pour les voyageurs. Vous cueillerez de l’herbe que l’on appelle armoise, dans le temps où le soleil fait son entrée au premier signe du Capricorne ; vous la laisserez un peu sécher à l’ombre, et en ferez des jarretières avec la peau d’un jeune lièvre, c’est-à-dire qu’ayant coupé la peau du lièvre en courroie de la largeur de deux pouces, vous en ferez un redoublé dans lequel vous coudrez ladite herbe, et les porterez aux jambes. Il n’y a point de cheval qui puisse suivre longtemps un homme de pied qui est muni de ces jarretières.

Ou bien vous prendrez un morceau de cuir de la peau d’un jeune loup, dont vous ferez deux jarretières ; sur lesquelles vous écrirez avec votre sang les paroles suivantes : Abumalith cados ; vous serez étonné de la vitesse avec laquelle vous cheminerez, étant muni de ces jarretières à vos jambes. De peur que les caractères écrits ne s’effacent, il sera bon de doubler la jarretière d’un padoue de fil blanc du côté de l’écriture.

« Il y a encore une manière de faire la jarretière, que j’ai lue dans un vieux manuscrit en lettres gothiques. En voici la recette. Vous aurez les cheveux d’un larron pendu, desquels vous ferez des tresses dont vous formerez des jarretières que vous coudrez entre deux toiles de telle couleur qu’il vous plaira ; vous les attacherez aux jambes de derrière d’un jeune poulairr ; puis vous laisserez échapper le poulain, le ferez courir à perle d’haleine, et vous vous servirez ensuite avec plaisir de ces jarretières[2]. »

On prétendait autrefois que les magiciens pouvaient donner une jarretière enchantée, avec laquelle on faisait beaucoup de chemin en peu de temps. C’est là peut-être l’origine des bottes de sept lieues.

Jaunisse. Les rois de Hongrie croyaient avoir le privilège de guérir la jaunisse par l’attouchement[3].

Javanais. Nous empruntons aux Études sur les Indes d’un résident néerlandais quelques détails sur les superstitions des Javanais idolâtres : Ils ont une foi entière aux songes, aux présages, divisent les jours en heureux et malheureux, jettent le sort à la naissance, croient aux dons surnaturels, à l’invulnérabilité, à la sorcellerie, aux enchantements, aux charmes, aux philtres. Rocs, forêts, montagnes, cavités, abîmes, tout est, selon eux, habité par des êtres invisibles ; et, ne se bornant point aux rêves de leur cerveau malade, ils ont adopté tout ce que le continent de l’Inde, l’Arabie, la Perse, présentent d’êtres merveilleux. Grands et petits, princes et paysans, ont la même crédulité. Heureusement tout cela est dépourvu le plus souvent de malice et d’artifice ; mais quelquefois leur aveuglement, excité par des motifs puissants, les pousse aux excès les plus coupables et les plus dangereux.

Entre les pratiques les moins à redouter, je citerai la suivante. Il est d’usage parmi les voleurs, à Java, d’exorciser, pour ainsi dire, la maison qu’ils ont dessein de piller ; à cet effet, ils jettent contre les murs, et même, s’il est possible, jusque dans le lit des habitants, une certaine quantité de terre tirée d’une fosse nouvellement creusée, afin d’y introduire un sommeil léthargique : après quoi ils volent avec la plus parfaite sécurité. Cette croyance n’est point bornée aux seuls larrons ; leurs victimes la partagent également. Ils mettent précieusement en réserve de la terre préparée pour cette opération, et souvent, dans les tournées que mes fonctions me forçaient de faire pour réprimer les déprédations, les voleurs que j’ai interrogés m’ont expliqué comment ils s’en servaient.

L’ancien code de Java, encore en vigueur à Bali, est rempli de lois contre la sorcellerie, et prouve jusqu’à l’évidence les funestes effets de la superstition sur l’esprit d’un peuple ignorant et entêté. En voici quelques extraits : « Si l’on écrit le nom d’un individu quelconque sur un drap mortuaire, une bière, une figure de pâte, ou une feuille, et ensuite si l’on enterre cet objet, si on le suspend à un arbre, si on l’expose sur la voie publique, ou au milieu de deux chemins qui se croisent, il y a sorcellerie. — Si l’on écrit le nom d’un individu quelconque sur un ossement, soit de la tête, soit de toute autre partie du corps, et qu’après avoir employé pour cette opération un mélange de sang et de charbon, on le place sur le seuil d’une porte, il y a sorcellerie. — Quiconque use de sortilèges, sera condamné à mort par le juge, et si la chose est prouvée d’une manière évidente, la peine de mort s’étendra sur les parents, les enfants, les petits-enfants du coupable, sans qu’aucun puisse en être excepté. — Qu’il ne soit point permis aux criminels convaincus d’une telle abomination de souiller plus longtemps la terre par leur présence ; que leurs propriétés de toute espèce soient confisquées ; que les parents et enfants du sorcier soient relégués dans la partie la plus reculée du pays, et s’ils prennent la fuite, qu’ils soient punis de mort ; que leurs biens soient, dans tous les cas, recherchés et confisqués. »

Jayet d’Islande. Les anciens Islandais attribuaient des vertus surnaturelles à ce jayet, qu’ils regardaient comme un ambre noir. Sa principale qualité était de préserver de tout sortilège celui qui en portait sur lui. En second lieu, ils le croyaient un antidote contre le poison. Sa troisième propriété était de chasser les esprits et

  1. Leloyer, Histoire des spectres ou apparitions des esprits, liv. II, p. 129.
  2. Secrets du Petit Albert, p. 90.
  3. Salgues, Des erreurs et des préjugés, t. I, p. 272.