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sur les Prestiges. Il a même consacré aux lamies un traité particulier[1].

« Les lamies écossaises, dit un écrivain que nous croyons à ses initiales être M. Alfred Michiëls, enlèvent surtout des enfants, et c’est ce qui a rendu les fées en général si redoutables en nos contrées. Il y en avait en Flandre qui envoyaient de toutes parts des esprits inférieurs, conduisant des voitures peintes en rouge, couvertes de toiles rouges, attelées d’un cheval noir. Les enfants qu’ils trouvaient isolés, ceux qu’ils pouvaient attirer par des promesses, ou en leur montrant des dragées et des joujoux, étaient emmenés par eux, et ils les jetaient dans la voiture avec un bâillon dans la bouche. Selon d’autres, ils les massacraient aussitôt ; c’est pour que le sang ne se vît pas qu’ils avaient adopté la couleur rouge pour leurs voitures. Ces voitures s’appelaient bloed-chies et ceux qui les menaient bloed-elven. Dès qu’on les poursuivait ils disparaissaient, et l’on ne trouvait plus que de grandes taupinières au beau milieu du pavé. Cette croyance causait un effroi si grand aux enfants que, dès qu’une voiture de couleur rouge venait à passer, tous se sauvaient en grande hâte. Je me rappelle fort bien avoir partagé la terreur générale. »

Lamotte le Vayer (François), littérateur, né à Paris en 1588 et mort en 1672. C’était, selon Naudé, le Plutarque de la France, ressemblant aux anciens par ses opinions et ses mœurs. Il a laissé des Opuscules sur le sommeil et les songes, in-8o, Paris, 1640.

Lampadomancie, divination dans laquelle on observait la forme, la couleur et les divers mouvements de la lumière d’une lampe, afin d’en tirer des présages pour l’avenir.

Lampe merveilleuse. Il y avait à Paris du temps de saint Louis un rabbin fameux, nommé Jéchiel, grand faiseur de prodiges, et si habile à fasciner les yeux par les illusions de la magie ou de la physique que les juifs le regardaient comme un de leurs saints, et les Parisiens comme un sorcier. La nuit, quand tout le monde était couché, il travaillait à la clarté d’une lampe merveilleuse, qui répandait dans sa chambre une lumière aussi pure que celle du jour. Il n’y mettait point d’huile ; elle éclairait continuellement, sans jamais s’éteindre et sans avoir besoin d’aucun aliment. On disait que le diable entretenait cette lampe et venait passer la nuit avec Jéchiel. Aussi tous les passants heurtaient à sa porte pour l’interrompre. Quand des seigneurs ou d’honnêtes gens frappaient, la lampe jetait une lueur éclatante, et le rabbin allait ouvrir ; mais toutes les fois que des importuns faisaient du bruit pour le troubler dans son travail, la lampe pâlissait ; le rabbin, averti, donnait un coup de marteau sur un grand clou fiché au milieu de la chambre ; aussitôt la terre s’entr’ouvrait et engloutissait les mauvais plaisants[2].

Les miracles de la lampe inextinguible étonnaient tout Paris. Saint Louis, en ayant entendu parler, fit venir Jéchiel afin de le voir ; il fut content, disent les juifs, de la science étonnante de ce rabbin, qui peut-être avait découvert quelque gaz.

Lampes perpétuelles. En ouvrant d’anciens tombeaux tels que celui de la fille de Cicéron, on trouva des lampes qui répandirent un peu de lumière pendant quelques moments, et même pendant quelques heures ; d’où l’on a prétendu que ces lampes avaient toujours brûlé dans les tombeaux. « Mais comment le prouver ? dit le père Lebrun ; on n’a vu paraître des lueurs qu’après que les sépulcres ont été ouverts et qu’on leur a donné de l’air. Or, il n’est pas surprenant que dans les urnes qu’on a prises pour des lampes il y eût une matière qui, étant exposée à l’air, devînt lumineuse, comme les phosphores. On sait qu’il s’excite quelquefois des flammes dans les caves, dans les cimetières et dans tous les endroits où il y a beaucoup de sel et de salpêtre. L’eau de la mer, l’urine et certains bois produisent de la lumière et même des flammes, et l’on ne doute pas que cet effet ne vienne des sels qui sont en abondance dans ces sortes de corps.

Ferrari a voulu démontrer, dans une savante dissertation, que ce qu’on débitait sur ces lampes éternelles n’était appuyé que sur des contes et des histoires fabuleuses[3].

Lampon, devin d’Athènes. On apporta un jour à Périclès, de sa maison de campagne, un bélier qui n’avait qu’une corne très-forte au milieu du front ; sur quoi Lampon pronostiqua (ce que tout le monde prévoyait) que la puissance, jusqu’alors partagée en deux factions, celle de Thucydide et celle de Périclès, se réunirait dans la personne de celui chez qui ce prodige était arrivé.

  1. J. Wieri de Lamiis liber. In 4°. Bâle, 1577.
  2. Sauvai, Antiquités de Paris, etc.
  3. Vers 1750 cependant, on fit, à Naples, la découverte d’un phosphore que l’on dut également au hasard. Le prince de San-Severo travaillait à un procédé chimique. Il ouvrit, à une heure après minuit, quatre cucurbites de verre. En voulant les examiner de trop près avec une bougie, la matière contenue dans un de ces vases prit feu sur-le-champ et donna une flamme jaune très-vive. Il laissa brûler pendant environ six heures la matière renfermée dans ce vase. La flamme, au bout de cet espace de temps, s’étant trouvée aussi belle et aussi forte qu’au premier instant, le prince San-Severo l’étouffa ; mais ayant voulu la raviver le lendemain, il n’y put parvenir qu’en ajoutant dans le même vase un quart d’once de la même matière, quoiqu’elle ne fût pas sensiblement diminuée de poids. Une fois rallumée, elle brûla six mois de suite, sans mouvement, sans altération de clarté, et sans déperdition apparente. Cette découverte justifia, jusqu’à un certain point, la vérité des lampes sépulcrales dont ont parlé les anciens, et que des savants modernes ont traitées de fables.