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PAC
PAI
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» Vous commencerez à réciter l’appellation suivante avec fermeté.

« Empereur Lucifer, maître de tous les esprits rebelles, je te prie de m’être favorable dans l’appellation que je fais à ton grand ministre Lucifuge Rofocale, ayant envie de faire pacte avec lui. Je te prie aussi, prince Belzébut, de me protéger dans mon entreprise. Comte Astarot, sois-moi propice, et fais que dans cette nuit le grand Lucifuge m’apparaisse sous une forme humaine, sans aucune mauvaise odeur, et qu’il m’accorde, par le moyen du pacte que je vais lui présenter, toutes les richesses dont j’ai besoin. Ô grand Lucifuge ! je te prie de quitter ta demeure, dans quelque partie du monde qu’elle soit, pour venir me parler ; sinon je t’y contraindrai par la force du grand Dieu vivant, de son cher Fils et du Saint-Esprit ; obéis promptement, ou tu vas être éternellement tourmenté par la force des puissantes paroles de la grande Clavicule de Salomon, paroles dont il se servait pour obliger les esprits rebelles à recevoir son pacte. Ainsi, parais au plus tôt, ou je te vais continuellement tourmenter par la force de ces puissantes paroles de la Clavicule : Agipn, tetagram, vaychéon stimulamaton y ezparès tetragrammaton oryoram irion esytion existion eryona onera brasim moym messias solerEmanuelSabaotAdonay, teadoro etinvoco. »

» Vous êtes sûr que, d’abord que vous aurez lu ces puissantes paroles, l’esprit paraîtra et vous dira ce qui suit : « Me voici : que me demandes-tu ? Pourquoi troubles-tu mon repos ? Réponds-moi. — Je te demande pour faire pacte avec toi, et enfin que tu m’enrichisses au plus tôt ; sinon je te tourmenterai par les puissantes paroles de la Clavicule. — Je ne puis t’accorder ta demande qu’à condition que tu te donnes à moi dans vingt ans, pour faire de ton corps et de ton âme ce qu’il me plaira. »

» Alors vous lui jetterez votre pacte, qui doit être écrit de votre propre main sur un petit morceau de parchemin vierge ; il consiste en ce peu de mots auxquels vous mettrez votre signature avec votre véritable sang. « Je promets au grand Lucifuge de le récompenser dans vingt ans de tous les trésors qu’il me donnera. En foi de quoi je me suis signé. »

» L’esprit vous répondra : « Je ne puis accorder ta demande. »

» Alors, pour le forcer à vous obéir, vous relirez la grande interpellation avec les terribles paroles de la Clavicule, jusqu’à ce que l’esprit reparaisse et vous dise ce qui suit : « Pourquoi me tourmentes-tu davantage ? Si tu me laisses en repos, je te donnerai le plus prochain trésor, à condition que tu me consacreras une pièce tous les premiers lundis de chaque mois, et que tu ne m’appelleras qu’un jour de chaque semaine, de dix heures du soir à deux heures après minuit. Ramasse ton pacte, je l’ai signé ; et, si tu ne tiens pas ta parole, tu seras à moi dans vingt ans. —

» J’acquiesce à ta demande, à condition que tu me feras paraître le plus prochain trésor que je pourrai emporter tout de suite. »

» L’esprit dira : « Suis-moi et prends le trésor que je vais te montrer. »

» Vous le suivrez sans vous épouvanter ; vous jetterez votre pacte tout signé sur le trésor, en le touchant avec votre baguette ; vous en prendrez tant que vous pourrez, et vous vous en retournerez dans le triangle en marchant à reculons ; vous y poserez votre trésor devant vous, et vous commencerez tout de suite à lire le renvoi de l’esprit.

» Voici maintenant la conjuration et renvoi de l’esprit avec lequel on a fait pacte :

« Ô grand Lucifuge ! je suis content de toi pour le présent ; je te laisse en repos et te permets de te retirer où bon te semblera, sans faire aucun bruit ni laisser aucune mauvaise odeur. Pense aussi à ton engagement de mon pacte, car, si tu y manques d’un instant, tu peux être sûr que je te tourmenterai éternellement avec les grandes et puissantes paroles de la Clavicule de Salomon, par lequel on force tous les esprits rebelles à obéir…[1] »

Pain (Épreuve du). C’était un pain fait de farine d’orge, bénit ou plutôt maudit par les imprécations d’un prêtre. Les Anglo-Saxons le faisaient manger à un accusé non convaincu, persuadés que s’il était innocent ce pain ne lui ferait point de mal ; que s’il était coupable il ne pourrait l’avaler, ou que s’il l’avalait, il étouffe-

  1. Voyez sur les pactes plusieurs légendes dans les Légendes infernales.