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l’eau bénite et à marmotter certaines paroles ; vers minuit, ils virent approcher de la maison une femme habillée de jaune, qui alla écouter à la porte ; un instant après, le perteman sortit, disposé à lier conversation avec le revenant ; il aperçut alors les gardes, prit la fuite, ainsi que la femme, et dans son trouble il laissa tomber son volume mystérieux qui, vérification faite, fut trouvé être un ouvrage de Mirabeau, intitulé De la monarchie prussienne sous Frédéric le Grand. Le perteman fut arrêté, et depuis le revenant n’a plus été vu ni par la jeune fille ni par personne. Ce fait s’est passé il y a moins de trente ans.

Pertinax. Trois ou quatre jours avant que l’empereur Pertinax fût massacré par les soldats de sa garde, on conte qu’il vit dans un étang je ne sais quelle figure qui le menaçait l’épée au poing.

Peste. Les rois de Hongrie se vantaient de guérir la jaunisse, comme les rois de France guérissaient les écrouelles, et comme ceux de Bourgogne dissipaient la peste.

Dans le pays de Reuss, on attribue les pestes et les diverses épidémies à une grande diablesse maigre, et remarquable par ses grands cheveux noirs et sordides. Elle parcourt les airs sur un chariot noir et marche, suivie de nombreuses filles de l’enfer, qui répandent partout des germes de mort.

Pet. Qui pète en mangeant voit le diable en mourant. Axiome populaire, répandu pour enseigner la bienséance aux enfants dans les contrées où l’on mange beaucoup de choux et de navets.

Petchimancie, divination par les brosses ou vergettes. Quand un habit ne peut pas se vergeter, c’est un signe qu’il y aura de la pluie.

Petit monde. On appelait petit monde une société secrète qui conspirait en Angleterre au dernier siècle pour le rétablissement des Stuarts. On débitait beaucoup de contes sur cette société : par exemple, on disait que le diable en personne, assis dans un grand fauteuil, présidait aux assemblées. C’étaient des francs-maçons.

Petit-Pierre. Les contes populaires de l’Allemagne donnent ce nom au démon qui achète les âmes et avec qui on fait pacte. Il vient au lit de mort, sous la forme d’un nain, chercher ceux qu’il a achetés.

Petpayatons. Les Siamois appellent ainsi les mauvais esprits répandus dans l’air. S’ils préparent une médecine, ils attachent au vase plusieurs papiers, où sont écrites des paroles mystérieuses pour empêcher que les Petpayatons n’emportent la vertu du remède.

Pétrobusiens, disciples de Pierre de Bruys, hérétique du Dauphiné, contemporain de la première croisade. Ils reconnaissent deux créateurs :Dieu et le diable. Ils disaient que les prières sont aussi bonnes dans un cabaret que dans une église, dans une étable que sur un autel ; en conséquence, ils détruisaient les édifices sacrés et brûlaient les croix et les images.

Pettimancie, divination par le jet des dés. Voy. Astragalomancie et Cubomancie.

Peucer (Gaspard) / médecin, né à Bautzen en 1525. Il était gendre de Mélanchthon et comme lui séparé de l’Église. Il a laissé un livre sur les divinations : De prœcipuis divinationum generibus, traduit en français par Simon Goulard. Anvers, 1584.

Peuplier. Les anciens regardaient le peuplier comme un arbre dédié aux enfers et aux démons.

Peur. On prétend que pour se préserver de la peur il faut porter sur soi une épingle qui ait été fichée dans le linceul d’un mort.

Un officier logé en chambre garnie, et sur le point de rejoindre son régiment, était encore dans son lit au petit point du jour, lorsqu’un menuisier, porteur d’un cercueil pour un homme qui venait de mourir dans la pièce voisine, entra, croyant ouvrir la porte de la chambre du mort. « Voilà, dit-il, une bonne redingote pour l’hiver. » L’officier ne douta pas qu’on ne vînt pour le voler. Aussitôt il saute à bas du lit et s’élance contre le prétendu voleur… Le menuisier, voyant quelque chose de blanc, laisse tomber son cercueil, et s’enfuit à toutes jambes, criant que le mort était à ses trousses… On dit qu’il en fut malade.

Un marchand de la rue Saint-Victor, à Paris, donnant un grand souper, la servante de la maison fut obligée de descendre à la cave à dix heures du soir. Elle était peureuse ; elle ne fut pas plutôt descendue, qu’elle remonta tout épouvantée, en criant qu’il y avait un fantôme entre deux tonneaux !… L’effroi se répandit dans la maison, les domestiques les plus hardis descendirent à la cave, les maîtres suivirent, et l’on reconnut que le spectre était un mort qui y avait glissé de la charrette de l’Hôtel-Dieu, et était tombé dans la cave par le soupirail.

Un provincial venu à Paris dans le temps du carnaval fit la partie, comme tant d’autres idiots, d’aller au bal masqué avec un de ses amis, et il se déguisa en diable ; c’était très-ingénieux. Les deux amis se retirèrent avant le jour. Comme le carrosse qui les remmenait passait dans le quartier où logeait le provincial, il fut le premier qui descendit, et son ami le laissa devant sa porte, où il frappa vivement, parce qu’il faisait grand froid. Il fut obligé de redoubler les coups avant de pouvoir éveiller une vieille servante de son auberge, qui vint enfin à moitié endormie lui ouvrir, mais qui, dès qu’elle le vit, referma sa porte au plus vite et s’enfuit en criant. Le provincial ne pensait pas à son costume ; et, ne sachant ce que pouvait avoir la servante, il se remit à frapper ; mais inutilement, personne ne revint. Mourant de froid, il prit le parti de chercher gîte ailleurs. En marchant le long de la rue, il aperçut de la lumière dans une maison ; pour comble