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laient ni des filous, ni des méchants, mais des farfadets ou démons. « J’étais plus savant, dit-il, que le vulgaire, qui ignore que les farfadets ne font le mal que par plaisir. »

Piripiris, talismans en usage chez certains Indiens du Pérou. Ils sont composés de diverses plantes ; ils doivent faire réussir la chasse, assurer les moissons, amener de la pluie, provoquer des inondations et défaire les armées ennemies.

Pison. Après la mort de Germanicus, le bruit courut qu’il avait été empoisonné par les maléfices de Pison. On fondait les soupçons sur les indices suivants : on trouva dans la demeure de Germanicus des ossements de mort, des charmes et des imprécations contre les parois des murs, le nom de Germanicus gravé sur des lames de plomb, des cendres souillées de sang, et plusieurs autres maléfices par lesquels on croyait les hommes dévoués aux dieux infernaux[1].

Pistole volante. Quoique les sorciers de profession aient toujours vécu dans la misère, on prétendait qu’ils avaient cent moyens d’éviter l’indigence et le besoin. On cite entre autres la pistole volante, qui, lorsqu’elle était enchantée par certains charmes et paroles magiques, revenait toujours dans la poche de celui qui l’employait, au grand profit des magiciens qui achetaient, et au grand détriment des bonnes qui vendaient ainsi en pure perte. Voy. Agrippa, Faust, Pasétès, etc.

Pithon, démon qui était familier avec Madeleine de la Croix.

Pivert. Nos anciens, dit le Petit Albert, assurent que le pivert est un souverain remède contre le sortilège de l’aiguillette nouée, si on le mange rôti à jeun avec du sel bénit ; c’était un oiseau d’augure. Élius, préteur romain, rendait la justice sur son tribunal, lorsqu’un pivert vint se reposer sur sa fête. Les augures, consultés sur ce fait, répondirent que tant qu’Élius prendrait soin de l’oiseau, sa famille prospérerait, mais que la république serait malheureuse ; qu’au contraire, lorsque le pivert périrait, la république prospérerait et la famille d’Élius serait à plaindre. Ce dernier, préférant l’intérêt public au sien, tua sur-le-champ l’oiseau en présence du sénat ; et quelque temps après, dix-sept jeunes guerriers de sa maison furent tués à la bataille de Cannes. Mais cette bataille n’accomplit que la moitié de la prédiction et démentit l’autre, puisqu’elle fut la plus désastreuse de toutes celles que perdit la république.

Planètes. Il y a maintenant plus de soixante planètes. Les anciens n’en connaissaient que sept, en comptant la lune, qui n’est qu’un satellite de la terre ; ainsi les nouvelles découvertes détruisent tout le système de l’astrologie judiciaire. Les vieilles planètes sont : le soleil, la lune, Mercure, Vénus, Mars, Jupiter et Saturne. Chaque planète gouverne un certain nombre d’années[2]. Les années où Mercure préside sont bonnes au commerce, etc. ; la connaissance de cette partie de l’astrologie judiciaire s’appelle Alfridarie.

Plante-bornes. Le plante-bornes est une des plus poétiques et des plus morales traditions. Les Auvergnats ont la passion de la propriété : conserver et surtout agrandir l’héritage, c’est le but principal de leur vie, l’honneur d’un nom ; et l’on dit :« Ce champ est dans ma famille depuis un siècle, » avec l’orgueil que l’on peut avoir ailleurs en montrant un parchemin établissant que son ancêtre était cousin de saint Louis ou frère d’armes de François Ier. À cet amour de la propriété, il fallait un frein ; car la tentation était dangereuse dans un pays où l’on ne connaissait pas de clôtures. La religion fut ce frein salutaire ; et longtemps encore après la révolution, ce n’étaient ni les juges, ni les experts qui réglaient les différends entre propriétaires, mais bien le curé. Le prêtre avait donc dû placer le respect des limites des champs au rang des choses les plus sacrées, et menacer souvent des vengeances éternelles ceux qui failliraient à ce respect. Il n’est donc pas étonnant que des imaginations frappées si vivement aient conçu la pensée du plante-bornes, c’est-à-dire de l’esprit, ou plutôt de l’âme de l’homme injuste revenant après sa mort expier son crime, en réparant ou faisant réparer le dommage causé à ses voisins. Le plante-bornes est d’un effet autrement puissant que la loi ; elle est terrible, mais aveugle ; souvent, avec de certaines précautions, on peut lui échapper ; tandis qu’avec le monde des esprits, il n’est ni ruses, ni chicanes, ni secret possible. L’amour de la famille même, le désir si naturel à tous les cœurs d’enrichir ses enfants, de les rendre heureux, conduisent le propriétaire à se surveiller scrupuleusement, à ne commettre jamais la plus légère infraction aux règles de la probité. Quel père voudrait léguer à ses fils des tourments perpétuels, la honte publique, avec le soin de réparer ses fautes, sous peine de la mort la plus affreuse ?

Car le plante-bornes ne s’en tient pas à une course vague, désordonnée, à travers les villages, mêlée de douloureux gémissements ; il finit par arriver à sa destination, frappe trois grands coups à l’étroite fenêtre de sa chaumière, en répétant par trois fois : « Plante-bornes !!! » Si les habitants, sous l’empire de la terreur, restent muets, on entend autour de la maison des

  1. Tacite.
  2. Les sept vieilles planètes président aussi aux sept jours de la semaine. Jarchas, brachmane, avec lequel Apollonius de Tyane philosopha secrètement, reçut de lui en présent sept anneaux portant les noms des sept planètes ; il les mettait à ses doigts les jours où elles régnaient, et chacun avait une vertu particulière.