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VAL
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leur élève. Veland s’empara alors des outils, chargea un cheval d’autant d’or et d’argent qu’il pouvait en porter, et reprit le chemin du Danemark, il arriva près d’un fleuve, nommé Visara ou Viser-Aa ; il s’arrêta sur la rive, y abattit un arbre, le creusa, y déposa ses trésors et ses vivres, et s’y pratiqua une demeure tellement fermée que l’eau ne pouvait y pénétrer. Après y être entré, il se laissa flotter vers la mer.

» Un jour, un roi de Jutland, nommé Nidung, pêchait avec sa cour, quand les pêcheurs retirèrent de leur filet un gros tronc d’arbre singulièrement taillé. Pour savoir ce qu’il pouvait contenir, on voulut le mettre en pièces ; mais tout à coup une voix, sortant du tronc, ordonna aux ouvriers de cesser. À cette voix, tous les assistants prirent là fuite, croyant qu’un sorcier était caché dans l’arbre. Veland en sortit ; il dit au roi qu’il n’était pas magicien, et que, si on voulait lui laisser la vie et ses trésors, il rendrait de grands services. Le roi lui promit. Veland cacha ses trésors en terre et entra au service de Nidung. Sa charge fut de prendre soin de trois couteaux que l’on mettait devant le roi à table. Le roi, ayant découvert l’habileté de Veland dans l’art de fabriquer des armes, consentit à ce qu’il luttât avec son forgeron ordinaire. Celui-ci fit une armure qu’il croyait impénétrable, mais que Veland fendit en deux d’un seul coup de l’épée d’or qu’il avait fabriquée en peu d’heures. Depuis lors, Veland fut en grande faveur auprès du roi ; mais ayant été mal récompensé d’un message pénible et dangereux, il ne songea plus qu’à se venger. Il tenta d’empoisonner le roi, qui s’en aperçut et lui fit couper les jarrets. Furieux de cette injure, Veland feignit du repentir ; et le roi consentit à lui laisser une forge et les outils nécessaires pour composer de belles armures et des bijoux précieux. Alors le vindicatif artisan sut attirer chez lui les deux fils du roi ; il les tua, et offrit à leur père deux coupes faites avec le crâne de ses enfants. Après quoi il se composa des ailes, s’envola sur la tour la plus élevée, et cria de toutes ses forces pour que le roi vînt et lui parlât. En entendant sa voix, le roi sortit. « Veland, dit-il, est-ce que tu es devenu oiseau ?

» — Seigneur, répondit le forgeron, je suis maintenant oiseau et homme à la fois ; je pars, et tu ne me verras plus. Cependant, avant de partir, je veux t’apprendre quelques secrets. Tu m’as fait couper les jarrets pour m’empêcher de m’en aller : je m’en suis vengé ; je t’ai privé de tes fils, que j’ai égorgés de ma main ; mais tu trouveras leurs ossements dans les vases garnis d’or et d’argent dont j’ai orné ta table. »

» Ayant dit ces mots, Veland disparut dans les airs.

» Ce récit est la forme la plus complète qu’ait reçue la légende de Vade et de son fils dans les monuments de la littérature Scandinave. Le chant de l’Edda, qui nous fait connaître Veland, diffère dans plusieurs de ses circonstances. Là, Veland est le troisième fils d’un roi alfe, c’est-à-dire d’espèce surnaturelle. Ces trois princes avaient épousé trois valkiries ou fées qu’ils avaient rencontrées au bord d’un lac, où, après avoir déposé leur robe de cygne, elles s’amusaient à filer du lin. Au bout de sept années de mariage, les valkiries disparurent, et les deux frères de Veland allèrent à la recherche de leurs femmes ; mais Veland resta seul dans sa cabane, et s’appliqua à forger les métaux. Le roi Niduth, ayant entendu parler des beaux ouvrages d’or que Veland faisait, s’empara du forgeron pendant qu’il dormait ; et, comme il faisait peur à la reine, celle-ci ordonna qu’on lui coupât les jarrets. Veland, pour se venger, accomplit les actions différentes que nous avons rapportées. »

Cette histoire de Wade et de son fils a été souvent imitée par les anciens poëtes allemands et anglo-saxons. Les trouvères français ont parlé plusieurs fois de Veland, de son habileté à forger des armures. Ils se plaisaient à dire que l’épée du héros qu’ils chantaient avait été trempée par Veland.

Vafthrudnis, génie des Scandinaves renommé pour sa science profonde. Odin alla le défier dans son palais, et le vainquit par la supériorité de ses connaissances.

Vagnoste, géant, père d’Agaberte. Voy. ce mot.

Vaïcarani, fleuve de feu que les âmes doivent traverser avant d’arriver aux enfers, selon la doctrine des Indiens. Si un malade tient en main la queue d’une vache au moment de sa mort, il passera sans danger le fleuve Vaïcarani, parce que la vache dont il a tenu la queue se présentera à lui sur le bord du fleuve ; il prendra sa queue et fera doucement le trajet par ce moyen.

Vaisseau-fantôme. Voy. Voltigeur hollandais.

Valafar ou Malafar, grand et puissant duc de l’empire infernal. Il paraît sous la forme d’un ange, quelquefois sous celle d’un lion avec la tête et les pattes d’une oie et une queue de lièvre. Il connaît le passé et l’avenir, donne du génie et de l’audace aux hommes, et commande trente-six légions[1].

Valens, empereur arien. « Curieux de savoir le nom de son successeur, il eut recours aux voies extraordinaires et défendues ; et comme le démon l’eut informé[2] qu’il le connaîtrait aux lettres théod, il fit mourir Théodore, Théodule, etc., sans penser à Théodose, qui lui succéda.

» Cette histoire, ajoute Chevreau, est peut-être plus connue que la suivante. Pierre-Louis, duc de Parme, étant averti par Lucas Gauric d’une

  1. Wierus, in Pseudomonarch. dæmon.
  2. Par l’alectryomancie. Voy. ce mot.