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VÉP
VER
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Il se montre quelquefois sous la forme d’un hibou.

À Quimper, en Bretagne, les femmes qui ont leur mari en mer vont balayer la chapelle la plus voisine et en jeter la poussière en l’air, dans l’espérance que cette cérémonie procurera un vent favorable à leur retour[1]. Dans le même pays, une femme ne souffre pas qu’on lui passe son enfant par-dessus la table ; si dans ce passage un mauvais vent venait à le frapper, il ne pourrait en guérir de la vie[2].

Vépar ou Sépar, puissant et redoutable duc du sombre empire. Il se montre sous la forme d’une syrène, conduit les vaisseaux marchands et afflige les hommes de blessures venimeuses, qu’on ne guérit que par l’exorcisme. Il commande vingt-neuf légions.

Vérandi. Voy. Nornes.

Verdelet, démon du second ordre, maître des cérémonies de la cour infernale. Il est chargé du transport des sorcières au sabbat. « Verdelet prend aussi le nom de Jolibois, ou de Vert-Joli, ou de Saute-Buisson, ou de Maître Persil, pour allécher les femmes et les faire tomber dans ses pièges, dit Boguet, par ces noms agréables et tout à fait plaisants. »

Verdung (Michel), sorcier de la Franche-Comté, pris en 1521 avec Pierre Burgot et le Gros-Pierre. Wierus a rapporté les faits qui donnèrent lieu au supplice des trois frénétiques[3]. Tous trois confessèrent s’être donnés au diable. Michel Verdung, qui se vantait d’avoir un esprit nommé Guillemin, avait mené Burgot près du Château-Charlon, où chacun, ayant à la main une chandelle de cire verte qui faisait la flamme bleue, avait offert des sacrifices et dansé en l’honneur du diable. Après s’être frotté de graisse, ils s’étaient vus changés en loups. Dans cet état, ils vivaient absolument comme des loups, dirent-ils.

Burgot avoua qu’il avait tué un jeune garçon avec ses pattes et dents de loup, et qu’il l’eût mangé, si les paysans ne lui eussent donné la chasse. Michel Verdung confessa qu’il avait tué une jeune fille occupée à cueillir des pois dans un jardin, et que lui et Burgot avaient tué et mangé quatre autres jeunes filles. Ils désignaient le temps, le lieu et l’âge des enfants qu’ils avaient dérobés. Il ajouta qu’ils se servaient d’une poudre qui faisait mourir les personnes. Ces trois loups-garoux furent condamnés à être brûlés vifs. Les circonstances de ce fait étaient peintes en un tableau qu’on voyait dans une église de Poligny. Chacun de ces loups-garoux avait la patte droite armée d’un couteau[4].

Verge. On donne quelquefois témérairement le nom de verge de Moïse à la baguette divinatoire. Voy. Baguette.

Sans doute aussi le lecteur a entendu parler de la verge foudroyante, avec laquelle les sorciers faisaient tant de prodiges. Pour la faire, il faut acheter un chevreau, le premier jour de la lune, l’orner trois jours après d’une guirlande de verveine, le porter dans un carrefour, l’égorger avec un couteau neuf, le brûler dans un feu de bois blanc, en conservant la peau, aller ensuite chercher une baguette fourchue de noisetier sauvage, qui n’ait jamais porté fruit, ne la toucher ce jour-là que des yeux, et la couper le lendemain matin, positivement au lever du soleil, avec la même lame d’acier qui a servi à égorger la victime, et dont on n’a pas essuyé le sang. Il faut que cette baguette ait dix-neuf pouces et demi de longueur, ancienne mesure du Rhin, qui fait à peu près un demi-mètre. Après qu’on l’a coupée, on l’emporte, on la ferre par les deux extrémités de la fourche avec la lame du couteau ; on l’aimante ; on fait un cercle avec la peau du chevreau qu’on cloue à terre au moyen de quatre clous qui aient servi à la bière d’un enfant mort. On trace avec une pierre ématite un triangle au milieu de la peau ; on se place dans le triangle, puis on fait les conjurations, tenant la baguette à la main, et ayant soin de n’avoir sur soi d’autre métal que de l’or et de l’argent. Alors les esprits paraissent, et on commande… Ainsi le disent du moins les grimoires.

Verge d’Aaron. Quelques esprits pointus, à propos de ces paroles du chapitre viii de l’Exode, où l’on voit qu’Aaron ayant étendu sa verge sur les fleuves, les rivières, et les étangs, toute l’Égypte fut remplie de grenouilles, en ont conclu que cette verge avait une puissance suprême, divine ou magique, et qu’elle était la cause de ces prodiges. Mais Benjamin Binet leur a répondu non : Aaron était le ministre et sa verge le symbole que Dieu employait.

Verre d’eau. On prédit encore l’avenir dans un verre d’eau, et cette divination était surtout en vogue sous la régence du duc d’Orléans. Voici comment on s’y prend : on se tourne vers l’orient, on prononce Abraxa per nostrum ; après quoi on voit dans le vase plein d’eau tout ce qu’on veut : on choisit d’ordinaire pour cette opération des enfants qui doivent avoir les cheveux longs.

À côté de la divination par le verre d’eau, par la coupe, qui était usitée en Égypte du temps de Joseph, et qui se pratique encore avec diverses cérémonies, par la carafe, comme l’exerçait Cagliostro, on pourrait placer d’autres divinations qui ont pour élément un corps liquide. M. Léon de Laborde donne le détail de scènes produites au Caire[5] par un Algérien réputé sorcier, lequel prenait l’enfant qu’on lui présentait, le magnétisait par des incantations, lui traçait dans la main certaines figures, plaçait sur celle main un pâté

  1. Cambry, Voyage dans le Finistère, t. III, p. 35.
  2. Cambry, Voyage dans le Finistère, t. III, p. 48.
  3. Liv. VI, ch. xiii.
  4. Boguet, p. 364.
  5. Revue des Deux Mondes, août 1833.