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générale ; la colère ; en latin ira ou furor brevis. Qu’est-ce que la colère ? C’est une passion violente dont les caractères les plus saillants sont l’accélération du cours du sang et de la respiration, une coloration très-vive de la face, avec des yeux étincelants joints à l’expression menaçante de la voix et des gestes (n’oublions pas et des gestes) ; ou bien, pâleur de visage, tremblement involontaire, altération de la voix, etc., etc. Tous ces phénomènes sont l’effet de l’état d’excitation violente dans lequel est entré le cerveau, à l’occasion d’une cause quelconque. Cette définition de la colère est toute médicale. Suivant les crânioscopes, l’état d’excitation violente dans lequel entre le cerveau, s’il se prolonge ou s’il se renouvelle fréquemment, produira à la longue une bosse au crâne. Quelle bosse ? Nous n’en savons vraiment rien, mais enfin nous acceptons la bosse. Mais dans la colère, il y a expression menaçante de la voix et du geste ; quel est l’organe principal du geste ? n’est-ce pas la main ? Dans la colère, la main ne se crispe-t-elle pas ? L’homme en colère ne ferme-t-il pas la main, ne roidit-il pas le poing comme s’il voulait frapper quelqu’un ou quelque chose ? Ces données admises, et elles ne peuvent pas ne pas l’être, l’homme qui aura fait une étude particulière de la main ne pourra-t-il pas découvrir dans la conformation de cet organe chez une personne si elle se met habituellement en colère ? En ce qui concerne la colère, il saute aux yeux de tout le monde que la xeirscopie offre des indications bien autrement certaines, bien autrement saisissables que la crânioscopie.

 
 

» Maintenant et pour l’utilité d’application, le docteur Sargenkœnig prouve sans peine que la xeirscopie laisse bien loin derrière elle son aînée. Jadis, avant de se lier avec une personne, on prenait la peine d’étudier son caractère, ses mœurs, ses habitudes ; tout cela est maintenant inutile ; la nature a pris soin de nous tout révéler ; si nous sommes trompés, c’est que nous le voulons bien. Et pourtant on ne peut guère dire à une personne avec laquelle on veut former une liaison : Je me sens disposé à vous aimer ; vous avez, suivant Lavater, une physionomie fort heureuse ; mais pour être plus sûr de mon fait, permettez que je vous tâte le crâne ; si vous n’avez aucune protubérance fâcheuse, je vous accorderai mon estime et vous demanderai votre amitié. Avec la xeirscopie, il suffit d’une poignée de main artistement donnée.

» Vous voulez vous marier. En pareil cas, de part et d’autre, on dissimule le plus habilement possible ses défauts ; le jeune homme est prévenant, affectueux ; la demoiselle fait patte de velours avec infiniment de grâce. Dans une pareille circonstance, impossible encore de tâter mutuellement le crâne ; mais il est toujours permis au fiancé de prendre la main de sa fiancée ; il peut, sans manquer aux règles de la décence, explorer doucement la face palmaire, l’éminence thénar et l’éminence hypothénar, la face dorsale, etc., etc. Il y a tel signe auquel on peut infailliblement reconnaître que l’un des deux époux sera égratigné avant la fin de la lune de miel.

 
 

» Les préjugés ne sont pas tous menteurs. On croit généralement que dans la cérémonie du mariage, si la jeune ou vieille épouse, au moment où le marié lui passe l’anneau au doigt annulaire, ou au quatrième des prolongements de l’extrémité du membre pectoral, parvient à fermer le doigt assez tôt pour que l’anneau ne franchisse pas la dernière phalange, elle sera maîtresse de la maison. Ce préjugé n’en est pas un. Ce mouvement instinctif du fléchisseur du quatrième prolongement de l’extrémité du membre pectoral est très-clairement expliqué comme effet physique d’une cause morale dans le traité de xeirscopie du docteur Sargenkœnig. En huit pages, le docte professeur démontre que cette action rapide du fléchisseur particulier du qua-