Page:Jaloux - Le reste est silence, 1910.djvu/180

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
170
LE RESTE EST SILENCE…

ici ? lui dis-je avec un douloureux élancement au cœur.

Elle eut un sourire contraint :

— Mais oui, mon petit.

— Tu as l’air fatigué.

— Je n’ai pas dormi, cette nuit.

Je n’osai insister, je sentais bien qu’autour de moi se jouaient des puissances plus fortes que nous, et j’en avais peur. Il y avait encore bien des choses menaçantes dans l’air de la maison. Je croyais qu’une fois maman revenue, tout irait pour le mieux et que ce passé équivoque serait aboli.

Déjà, je n’y songeais plus, et papa ne semblait pas s’en souvenir ; mais qu’avait-elle donc, maman, à ne pas oublier ? Quoi ! c’était là tout son plaisir d’avoir retrouvé son intérieur, son fils, des souvenirs précieux et doux ? Et j’étais sourdement furieux. Mais, quand je levais les yeux sur elle, et que je voyais son air absent, ses yeux vides et meurtris, sa lassitude, j’avais envie de l’embrasser, parce que je comprenais qu’elle avait un grand