Page:James Guillaume - L'Internationale, III et IV.djvu/110

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J’espère que l’aveu est assez complet ! La « supériorité numérique » est du côté des autonomistes ; les autoritaires n’ont plus rien ; il ne leur viendra de délégués ni de France, ni d’Allemagne, ni de Danemark, ni de nulle part sauf Genève, on peut le prévoir. Et alors, il faudra se résoudre à tenir un Congrès en catimini au Temple-Unique, entre Genevois, en exhortant MM. Becker, Perret, Duval et Outine à prendre leurs mesures pour que les « bakounistes » soient accueillis avec des gourdins, s’ils tentent d’envahir le « domicile privé » où le dernier carré de l’armée marxiste se sera retranché pour la défense suprême.

Sorge ne manqua pas d’exécuter ponctuellement les ordres reçus. Le 30 mai, le Conseil général votait la résolution suivante, qui reproduisait à peu près textuellement les indications envoyées par Engels[1] :


Vu que le Congrès de la Fédération belge, tenu le 25 et 26 décembre 1872 à Bruxelles, a résolu de déclarer nulles et non avenues les résolutions du cinquième Congrès général[2] ;

Que le Congrès d’une partie de la Fédération espagnole, tenu à Cordoue du 25 décembre au 2 janvier 1873, a résolu de ne pas reconnaître les résolutions du cinquième Congrès général et d’adopter les résolutions d’une assemblée anti-internationale ;

Qu’une assemblée[3] tenue à Londres le 26 janvier 1873 a résolu de rejeter les actes du cinquième Congrès général[4] ;

Le Conseil général de l’Association internationale des travailleurs, conformément aux statuts et règlements administratifs et d’accord avec sa résolution du 26 janvier 1873[5] déclare :

Toutes les Fédérations régionales ou locales, sections et personnes ayant participé aux Congrès et assemblées mentionnés ci-dessus, de Bruxelles, Cordoue et Londres, ou en reconnaissant les résolutions, se sont placées elles-mêmes en dehors de l’Association internationale des travailleurs et ont cessé d’en faire partie.


En même temps, il déclara de nouveau « qu’il n’existe pas une Fédération régionale italienne de l’Internationale, puisque aucune organisation s’attribuant ce titre n’a jamais rempli la moindre des conditions d’admission et d’affiliation imposées par les statuts et règlements administratifs ».

Cette appréhension de voir le futur Congrès marxiste en butte à une invasion d’«alliancistes », qui avait causé à Engels de si vives alarmes, était sans fondement, comme on l’a vu. Lorsque la nouvelle de la décision du Congrès jurassien relative au Congrès général (voir p. 69) fut parvenue à Londres[6] au bout

  1. Je ne connais cette résolution du 30 mai que par le pamphlet L’Alliance, etc., qui en donne le texte (p. 56), en la présentant, naturellement, comme un acte proprio motu des dociles pantins de New York.
  2. Le Congrès de la Haye.
  3. Par le choix de cette expression d’« assemblée », le Conseil général s’est figuré sans doute avoir enlevé toute valeur au Congrès de la Fédération anglaise du 26 janvier.
  4. La Fédération jurassienne n’est pas mentionnée, soit que le Conseil général ne connût pas encore les résolutions du Congrès de Neuchâtel, soit qu’il n’y eût pas trouvé les « motifs suffisants » dont avait parlé Engels, soit encore qu’il jugeât préférable de s’en tenir, jusqu’au Congrès général, à l’ukase de « suspension ».
  5. Voir ci-dessus p. 58.
  6. Engels ne l’apprit que par la lecture du journal l’Internationale, de Bruxelles. Il ne lisait pas notre Bulletin : on s’était fait, dans l’entourage de Marx, un point d’honneur de ne pas s’y abonner.