Page:James Guillaume - L'Internationale, III et IV.djvu/234

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dans la Romagne, et qui s’est bornée, paraît-il, à la rupture des fils télégraphiques entre Bologne et Imola. On a annoncé en même temps l’arrestation de vingt-huit gros bonnets du parti mazzinien, surpris dans une campagne près de Rimini, où ils tenaient une réunion clandestine ; parmi eux se trouve Saffi, l’ex-triumvir romain, devenu le pontife du parti depuis la mort de Mazzini. En l’absence de tout renseignement direct, nous ne pouvons faire que reproduire ces nouvelles sans commentaire, en faisant remarquer toutefois qu’il ne faut accueillir qu’avec une extrême défiance les télégrammes des agences bourgeoises... Il nous paraît extrêmement douteux, par exemple, qu’il y ait le moindre rapport réel entre l’arrestation des mazziniens et celle des internationaux, attendu que les premiers ont toujours été des adversaires acharnés de l’Internationale.

... Depuis deux ans, il y a eu en Italie environ soixante émeutes produites par la faim ; mais les émeutiers, dans leur ignorance, n’en voulaient qu’aux accapareurs immédiats, et ne savaient pas discerner les causes fondamentales de leur misère. L’Internationale, en ouvrant les yeux aux ouvriers, en leur montrant à qui ils doivent s’en prendre et sur quelles institutions ils doivent frapper, transformera un jour les émeutes isolées, aveugles et impuissantes, en une révolution générale, consciente et réfléchie, et par conséquent irrésistible. Le gouvernement a beau emprisonner les apôtres du socialisme, il ne peut pas mettre sous clef le volcan populaire ; et, quand il aura fait condamner par centaines de généreux martyrs de la justice, il n’en sera pas moins englouti dans l’éruption finale. (Bulletin du 16 août 1874.)

Nous savons maintenant à quoi nous en tenir sur les derniers événements d’Italie, qui ont beaucoup moins de gravité que la police ne voudrait leur en donner.

Le 2 août, le gouvernement a fait arrêter vingt-huit mazziniens qui s’étaient réunis à la villa Ruffi, près de Rimini, pour faire de la politique électorale, tout simplement.

Trois jours plus tard, le 5 août, la police réussissait à mettre la main sur le compagnon André Costa, qu’elle cherchait depuis plus d’un an, et à qui elle en voulait tout particulièrement pour sa participation au Congrès international de Genève. L’arrestation de Costa n’avait du reste, malgré cette coïncidence, pas le moindre rapport avec le coup de filet opéré sur les mazziniens.

Enfin, deux jours après, quelques jeunes gens d’Imola essayaient une émeute. Selon la statistique que nous avons donnée dimanche dernier, cette émeute était la soixante et unième depuis deux ans, et par conséquent, au point de vue italien, cela ne constituait qu’un événement fort ordinaire.

Voilà tout ce qui s’est passé. Malheureusement il y aura, au bout de l’histoire, une distribution de mois de prison en faveur des socialistes, tandis que messieurs les mazziniens seront congédiés dans quelques jours avec force excuses pour la liberté grande qu’on s’est permise à leur égard. Cela n’empêchera pas le socialisme de grandir, et la république mazzinienne, atteinte depuis longtemps d’une maladie de langueur, d’exhaler son dernier souffle un de ces quatre matins. (Bulletin du 23 août 1874.)