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et à se fédérer pour la résistance : « Que quelques-uns se mettent à l’œuvre dans chaque fabrique, que ces minorités s’entendent entre elles, et, en peu de temps, l’organisation sera devenue un fait ». (Bulletin du 17 janvier.) Mais cet appel ne produisit pas de résultat ; le prolétariat des fabriques était encore trop passif, trop résigné, trop dominé, comme l’écrivait Schwitzguébel, « par cette fatale idée qu’il n’y a rien à faire ». La Fédération ouvrière du Val de Saint-Imier, elle, continuait à faire des progrès ; dans son assemblée générale du 17 janvier, deux nouvelles sociétés de résistance furent admises : celle des faiseurs d’échappements et celle des polisseuses de roues et d’acier ; les peintres et émailleurs étaient le seul métier organisé qui restât encore en dehors de la Fédération. Le magasin coopératif avait réalisé, dans les huit derniers mois de 1874, un bénéfice de 669 fr., qui restait la propriété collective de la Fédération ouvrière. — En mars, quelques patrons monteurs de boîtes, à Saint-Imier, ayant décidé d’imposer une baisse des salaires, la Fédération ouvrière prit fait et cause pour les ouvriers monteurs de boîtes ; il fut résolu de créer un atelier coopératif de production, pour maintenir les prix, atelier qui serait la propriété collective de la section des monteurs de boîtes ; dans son assemblée du 11 avril, la Fédération décida d’ouvrir à cet effet un crédit de trois mille francs à cette section ; elle vota en outre l’ouverture d’un second magasin coopératif à la Saint-Martin (le 11 novembre). L’association des ouvrières peintres en cadrans fut admise dans la Fédération.

En février furent fondées, à Fribourg et à Zürich, deux Sections de l’Internationale, de langue française, qui firent adhésion à la Fédération jurassienne.

À l’occasion de la fête patriotique du 1er mars, dans le canton de Neuchâtel, le Bulletin rappela une fois de plus l’article publié par le Progrès en 1869 (voir tome Ier, p. 134), en ajoutant : « Cet anniversaire glorieux et libérateur dont parlait le Progrès, — celui de l’émancipation définitive du travail, — il est encore à venir ; mais, en attendant, nous en avons un qui nous rappelle la première tentative sérieuse qui ait été faite pour l’établissement du régime de justice et d’égalité : c’est le 18 mars, c’est la journée qui vit s’accomplir la Révolution communaliste de Paris ».

L’anniversaire du 18 mars fut commémoré avec beaucoup d’enthousiasme dans toutes nos sections ; et le Bulletin publia le télégramme suivant, qu’il avait reçu de Lugano : « Socialistes tessinois et italiens, réunis pour fêter l’héroïque 18 mars, envoient aux socialistes jurassiens un salut fraternel. Salvioni. »

Le 28 mars, le Bulletin annonçait : « Quelques socialistes de Moutier viennent de reconstituer une section de la Fédération jurassienne à Moutier. Bon courage à cette nouvelle section. Zürich, Fribourg, Moutier, depuis le 1er janvier, cela marche. À bientôt Bienne et Yverdon ! » Je me rendis à Yverdon en avril, pour essayer de grouper quelques ouvriers de cette ville ; mais ils vinrent trop peu nombreux à la réunion pour pouvoir se constituer en section. Quant à Bienne, ce n’est qu’en septembre qu’une nouvelle section devait y être reformée.

Voici quelques indications fournies par le Bulletin sur la vie de nos sections :

Vevey : « Le nombre des membres de notre section va toujours en augmentant, et le mouvement de la classe ouvrière de notre district commence à s’accentuer. Les corporations ouvrières de Vevey ont eu dernièrement plusieurs réunions dans le but de constituer une fédération locale, et les efforts faits ont abouti. La Fédération locale de Vevey adhère aux principes de l’Internationale, et, comme elle est composée d’ouvriers allemands aussi bien que d’ouvriers français, elle a reconnu le Bulletin et le Tagwacht pour ses deux organes. » (21 février.) — Le 18 août eut lieu la constitution définitive de l’Union ouvrière et l’adoption de ses statuts ; sept sociétés, dont la section locale du Grütli, y avaient adhéré. « Le soir, une foule d’environ quatre cents personnes se pressait dans la salle où avait eu lieu l’assemblée, et jusque dans la cour ; cette réunion familière a pris l’air d’une fête... Cette belle journée a prouvé à nos adversaires que l’Internationale n’est pas morte à Vevey. » (25 avril.)

Fribourg : Un ouvrier ferblantier, Stutz, ayant été victime d’un acte arbitraire de la police, suivi d’une condamnation à douze heures de prison, la Sec-