Page:James Guillaume - L'Internationale, III et IV.djvu/628

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comme le rédacteur de la Tagwacht, M. Greulich, le chasseur à Zürich des manifestations ouvrières pour plaire à un député radical. »

En même temps, le Mirabeau publiait une résolution votée par le cercle l’Étincelle dans sa séance du 6 juillet, par laquelle les membres de ce cercle se déclaraient « solidaires du mouvement insurrectionnel de Bénévent (Italie), aussi bien que de celui de Kazan, et de tous les mouvements révolutionnaires faits en faveur de la cause des travailleurs ».


On a vu (p. 218) la circulaire que le bureau fédéral avait adressée, à la date du 6 juillet, aux Fédérations régionales de l’Internationale, pour leur communiquer la proposition de la Fédération jurassienne : que le Congrès général de l’Association se réunit à Verviers, et qu’au lieu de s’ouvrir le premier lundi de septembre (3 septembre), date statutaire, il commençât seulement deux ou trois jours plus tard, afin que sa clôture coïncidât avec la date de l’ouverture du Congrès universel des socialistes à Gand (9 septembre). L’exemplaire de cette circulaire destiné à la Fédération belge avait été adressé au secrétaire correspondant du Conseil régional belge. Ph. Coenen, à Anvers, le rédacteur du Werker. Celui-ci, au lieu de communiquer la circulaire aux sections belges, comme c’était son devoir, la garda dans sa poche (ainsi qu’il avait déjà fait, apprîmes-nous, de la circulaire du Bureau fédéral du 8 mai : voir p. 192), en sorte que les sections de l’Internationale en Belgique ne furent pas avisées par leur Conseil régional qu’il dût se tenir en 1877 un Congrès général de l’Association, et que la ville proposée pour la tenue de ce Congrès fût Verviers. Il y avait, dans cette attitude de Coenen, une manœuvre dont nous ne comprîmes toute la portée et toute la perfidie que plus tard. Les Flamands, alliés aux hommes de la Chambre du travail de Bruxelles, étaient devenus les adversaires de l’Iternationale, qu’ils voulaient remplacer en Belgique par un Parti ouvrier politique et parlementaire[1] ; en conséquence, ils profitaient de ce que le Conseil régional belge était entre leurs mains pour tâcher d’empêcher, autant que la chose dépendait d’eux, la réunion du Congrès général de l’Association, en laissant ignorer aux sections de Belgique la convocation de ce Congrès. Ce furent des lettres de Verviers qui nous apprirent, vers la fin de juillet, les manigances auxquelles s’étaient livrés les peu scrupuleux membres du Conseil régional, et leur tactique d’abstention et de silence. Mais il était encore temps de déjouer la manœuvre : le Bureau fédéral, avisé de ce qui s’était passé, envoya directement des exemplaires de ses circulaires du 8 mai et du 6 juillet au Conseil fédéral de la vallée de la Vesdre. Cet incident acheva d’édifier les internationaux de Verviers sur les intentions de ceux qui avaient voulu les conduire où ils ne voulaient pas aller, et qu’on avait laissés, pendant des mois, mener dans le Mirabeau une campagne sournoise contre l’Internationale révolutionnaire. Les deux circulaires dont Coenen avait dissimulé l’existence furent publiées dans le Mirabeau ; et le Conseil fédéral de la vallée de la Vesdre écrivit au Bureau fédéral, à la Chaux-de-Fonds, une lettre annonçant que, si l’Internationale décidait de tenir son Congrès général à Verviers, les ouvriers de cette ville seraient heureux de recevoir parmi eux les délégués de l’Association et leur feraient l’accueil le plus fraternel. Le 12 août, un Congrès des sections et corporations de la vallée de la Vesdre, réuni à Verviers, vota à l’unanimité d’accepter la proposition de la Fédération jurassienne de tenir dans cette ville le Congrès général de l’Internationale.

J’ai retrouvé une lettre de Pierre Fluse à Kropotkine, sans date, mais qui doit être de la fin de juillet, et qui est relative aux incidents que je viens de mentionner ; Fluse écrivait :


Mon cher Levachof, veuillez, s’il vous plaît, transmettre la lettre ci-jointe

  1. J’ai montré plus haut (p. 121) comment, dès le début, le but secret des fondateurs de la Chambre du travail de Bruxelles avait été de supplanter l’Internationale.