Page:James Guillaume - L'Internationale, I et II.djvu/595

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

espèce. Je vous l’avais déjà dit, à peu près en ces termes, en septembre 1870, à Lyon, à propos de Richard. Mais tout ce que nous avons appris depuis dépasse l’imagination. Quel ignoble vilain, et en même temps quel sot ! Il croit s’ouvrir une nouvelle carrière, et il pourrira dans la boue, dans les bas-fonds des antichambres bonapartistes. Il n’a même pas assez de sens pratique pour devenir un coquin. Si quelque chose me console, c’est que je le lui avais prédit, et cela à la veille du Congrès de Lyon en 1870[1].

«... Si notre ami C.[2] connaissait leur résidence actuelle, cela lui donnerait peut-être l’envie de faire un petit voyage pour leur donner une légère leçon de gymnastique. Oh, les canailles ! oh, les lâches gredins ! Il n’y a pas de doute pour moi qu’ils se sont vendus à quelque valet d’un valet de Bonaparte, pour deux ou trois mille francs. Ils sont si niais tous les deux que cela leur paraît immense ! Innocents et canailles à la fois ! Quels originaux ! Pouah ! ... »

Tous ceux qui ont connu Richard et Blanc approuveront ce jugement.


Le numéro se terminait par quelques nouvelles de Belgique et de France, et par quelques lignes écrites « au moment de mettre sous presse », où je prenais la défense de Bastelica attaqué par l’Égalité, qui l’accusait d’être le complice de Richard et de Blanc et avait fait afficher sur les murs de Genève un placard intitulé : Au pilori Richard, Blanc et Bastelica ! L’Internationale de Bruxelles avait publié de son côté (3 février) une correspondance où l’accusation de complicité était également lancée contre Bastelica : le Comité fédéral jurassien intervint par une lettre du 9 mars au Conseil fédéral belge, lequel, après enquête, publia (Internationale du 5 mai) une déclaration attestant « que le citoyen Bastelica n’a cessé de donner des gages de son dévouement à la cause, et que sa vie laborieuse et pénible en exil impose silence à la calomnie ».


Le n° 2 du Bulletin, qui fut autographié par Huguenot comme le premier, porte la date du 7 mars. Il contient une réponse à une « Adresse aux Sections italiennes » publiée par la Section italienne de Genève (Temple-Unique) dans l’Égalité du 28 janvier ; j’aurai à revenir sur cette Adresse en parlant de l’Italie (p. 268). Venait ensuite un article intitulé Le Congrès général, où je faisais remarquer que nous n’avions point demandé la convocation « d’un Congrès irrégulier, extraordinaire », ainsi que nos adversaires affectaient de le croire :


Nous demandons la convocation d’un Congrès régulier. Nous demandons, puisque le Congrès de 1871 n’a pas pu être convoqué avant la fin de l’année, — comme quelques-uns d’entre nous l’auraient désiré d’abord et comme le demandait la circulaire du Congrès de Sonvillier, — qu’au moins on ne supprime pas celui de 1872, et qu’il ait lieu en septembre prochain, conformément aux statuts.


L’article ajoutait :


Il existe une intrigue dans l’Internationale, intrigue dont le but est de transformer cette Association en une organisation autoritaire, en un instrument destiné à servir l’ambition de quelques indivi-

  1. Bakounine veut parler de l’assemblée de Lyon du 13 mars 1870 (voir t. Ier, p. 283). Peu de jours avant cette réunion, il avait, dans une lettre intime, morigéné Richard, auquel il reprochait son « charlatanisme » et sa « manie de poser ».
  2. Camet (voir p. 147), que Bakounine, amusé par l’allitération, appelait toujours « Camille Camet, canut ». Il était à ce moment réfugié à Zürich.