Page:James Guillaume - L'Internationale, I et II.djvu/682

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Plus loin, la Commission formule contre Bakounine une accusation d’escroquerie. Or, à l’appui d’une inculpation si grave, il n’a pas été fourni au Congrès le plus petit brin de preuve, et l’accusé n’a été ni prévenu ni entendu ! Il y a donc là une diffamation pure et simple. Mais il est inutile d’insister : l’honneur de Bakounine ne peut pas être atteint par de semblables indignités.

Le président de la Commission, Cuno, expliqua au Congrès que la Commission n’avait, à la vérité, reçu aucune preuve matérielle des faits imputés aux citoyens mis en cause, mais qu’elle avait acquis à leur égard une certitude morale ; et que, n’ayant pas d’arguments à présenter au Congrès à l’appui de son opinion, la Commission se bornait à lui demander un vote de confiance !

Il fut donné ensuite lecture de la déclaration de Roch Splingard, dont voici les termes :


Je proteste contre le rapport de la Commission d’enquête sur l’Alliance et me réserve de faire valoir mes raisons devant le Congrès. Une seule chose me paraît acquise au débat, c’est la tentative de M. Bakounine d’organiser une société secrète au sein de l’Association.

Quant aux expulsions proposées par la majorité de la Commission d’enquête, je déclare ne pouvoir me prononcer comme membre de ladite Commission, n’ayant pas reçu de mandat à ce sujet[1], et me déclarant prêt à combattre cette décision devant le Congrès.

Roch Splingard.


Splingard développa ses conclusions en quelques paroles énergiques, qui firent justice du rapport de la Commission et de l’étrange discours de Cuno.

Guillaume, invité à se défendre, refusa de le faire, en disant que ce serait avoir l’air de prendre au sérieux la comédie organisée par la majorité. Il se borna à faire remarquer que c’était le parti fédéraliste tout entier que la majorité cherchait à atteindre par les mesures dirigées contre quelques-uns de ses membres : « Mais, ajouta-t-il, votre vengeance vient trop tard, nous avons pris les devants, notre pacte de solidarité est fait et signé, et nous allons vous le lire ».

Schwitzguébel se contenta de dire : « Nous sommes condamnés d’avance ; mais les travailleurs condamneront la décision de votre majorité[2] ».

Et là-dessus Dave, délégué de la Section de la Haye, donna lecture de la déclaration suivante :


Déclaration de la minorité.

Nous soussignés, membres de la minorité du Congrès de la Haye, partisans de l’autonomie et de la fédération des groupes de travailleurs, devant le vote de décisions qui nous semblent aller à l’encontre des principes admis par les pays que nous représentons, mais désirant éviter toute espèce de scission dans le sein de l’Association internationale des

  1. Il veut dire que la Commission n’a pas reçu du Congrès le mandat de proposer des expulsions, mais seulement de faire une enquête.
  2. M. Sorge, dans une des annotations qu’il a ajoutées aux lettres de Marx, Engels, Becker, etc., récemment publiées par lui, a écrit, à propos de l’attitude de Schwitzguébel : « Schwitzguébel réussit à se sauver par un appel larmoyant (Schwitzguébel rettete sich durch einen weinerlichen Appell) ». Je n’ai pas besoin de dire que c’est là un mensonge.