Page:Jammes - Feuilles dans le vent, 1914.djvu/315

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qui découvre ses jambes rondes gainées de soie de bronze à jour, Luce d’Atchuria fait face à Johannès Arnoustéguy. Le rythme hésite, puis les prend tous deux. Les bras se haussent, s’incurvent en anse au-dessus de la tête qui se renverse, les doigts claquent comme des castagnettes. Luce, levant peu à peu la jambe droite, comme si elle allait gravir la première marche dun escalier aérien, fronce les sourcils. Ses yeux de belladone, sous la transe du rythme qu’assourdit une guitare que vient de détacher du mur Mariquita, dilatent leurs baies obscures jusqu’à prendre une expression farouche, à force d’être ardente.

Johannès se balance longuement, puis il ploie devant elle un genou et semble la supplier comme fait devant un jeune taureau le matador qui l’affronte…

Alors, quittant le piano, une plume d’hyacinthe blanche dans ses cheveux de soleil sous la neige. Pomme d’Anis, appuyée sur sa canne, fait péniblement le tour du salon.

Elle invite ses amis au goûter qu’elle a pré-