Page:Jammes - Feuilles dans le vent, 1914.djvu/76

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fleuri l’enclos de Domrémy, s’épanouissait comme un grand tournesol, ou comme l’ombelle qui ombrage l’Hostie, au-dessus d’une prairie où Pierre apercevait Pentecôte. Elle suspendait la lessive, on eût dit qu’elle mesurait de la neige.

Ainsi, tant de nobles personnages avaient pénétré dans l’Auberge des douleurs pour y verser le baume du bon Samaritain. Pascal ne les avait point entendus tirer la cloche du portail ni vus entrer, car les morts pénètrent sans bruit au cœur des saintes habitations. Et ni Pierre ni ses compagnons d’infortune, qui tenaient entre leurs doigts les images de ces preux, n’en connaissaient bien l’histoire. Mais il suffisait que ceux-ci revêtissent des habits éclatants, qu’ils ceignissent des diadèmes et des baudriers, qu’ils tinssent des glaives et des boucliers, pour que ceux-là leur fussent reconnaissants de leur belle assistance. Ceux qui sont vraiment grands ne négligent pas les humbles, et ils sont grands les morts qui viennent s’asseoir en silence sur l’escabeau du pauvre et lui tenir compagnie.