Page:Jammes - Le Roman du lièvre, 1922.djvu/111

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sentiments confus qui la hantent depuis la veille, ne surgit qu’une idée de pitié passionnée pour la pauvre trépassée. Clara d’Ellébeuse murmure mentalement : Laure… Pauvre Laure… Laura… Dolora… Dolorida… Et elle prête à cette triste inconnue, dans son exaltation, le nom de la Vierge douloureuse.

M.  le curé monte en chaire et, tandis qu’il prêche dans le patois du pays, Clara d’Ellébeuse regarde les assistants devant elle. Elle vient de reconnaître, à droite du bénitier, le frère d’une de ses amies de pension : Roger Fauchereuse.

La famille de sa compagne de classe Lia Fauchereuse habite aux environs, à une lieue et demie de Balansun, le château des saules. C’est un vieux manoir précédé d’une immense cour où, toute la journée, se promènent des légions de paons. Une longue avenue de saules et de chênes y conduit. M.  et Mme  Fauchereuse sortent peu. Mme  Fauchereuse est d’humeur bizarre qui ne laisse point, à certaines époques, d’inquiéter son mari. Celui-ci est un gentilhomme rural, fort bien élevé et très intelligent, qui fit à Montpellier de bonnes études en médecine. Il peut ainsi, et sans que ses offices tournent à métier, exercer sa charité auprès de pauvres voisins, voire se trouver utile à des amis en cas pressant. M.  d’Ellébeuse a ren-