Page:Jammes - Le Roman du lièvre, 1922.djvu/252

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Les oies allaient devant eux comme des morceaux de lune.



Elle lui disait :

— Je sais que tu es savant et que je ne peux pas savoir ce que tu sais. Mais je sais que je t’aime. Tu viens d’ailleurs, et tu as dû naître dans un joli berceau comme celui que je vis un jour sur une charrette. Il était pour des riches. Ta mère doit bien parler. Je t’aime. Tu as dû coucher avec des femmes qui ont la figure très blanche, et tu dois me trouver laide et noire. Moi, je ne suis pas née dans un joli berceau. Je suis née aux champs, au moment que l’on moissonne, dans le blé. On m’a dit cela, et que ma mère et moi et un petit agneau qu’une brebis avait mis bas le même jour, on nous mit sur un âne jusqu’à la maison. Les riches ont des chevaux.

Il lui disait :

— Je sais que tu es simple et que je ne peux pas être comme toi. Mais je sais que je t’aime. Tu es d’ici, et on a dû te bercer dans un panier posé sur une chaise noire, comme celui que j’ai vu dans une image. Je t’aime. Ta mère doit filer