Page:Jammes - Le Triomphe de la vie, 1911.djvu/61

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Il met la joue doucement sur les seins
de la paysanne dorés comme du pain.
Et un grillon chante dans le pétrin.
Dehors, la nuit coupe la lune claire.
Les arbres sont de l’ombre plus épaisse,
une ombre si épaisse qu’on dirait
qu’ils ont en eux l’ombre de la journée,
et que cette ombre en eux s’est retirée
pour y dormir jusqu’à la matinée.
Quel silence d’amour que n’interrompt
que le grésillement du crapaud qu’on
entend sous quelque pierre du perron...
La lune, à travers le catalpa, monte.
On disting-ue ses continents que ronge
une lumière où s’endorment des songes...
Le jardin prie. On sent battre le cœur
des pêches dans le silence de Dieu.
Elles sont duvetées comme la lueur
des joues éclatantes de ces danseuses
qui, à Laruns, pareilles à des fleurs,
se déploient en lentes rondes paresseuses.