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Page:Jan - Dans la bruyère, 1891.djvu/103

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LE BATEAU


Les cygnes blancs sont morts, morte est la promeneuse,
Morts les rêves heureux qu’elle n’a pas finis !
Et le canot est là, couché dans l’eau bourbeuse,
Sourd au sonore appel des ailes et des nids.

Oui, cette sombre allée où personne ne passe,
Cet étang qui croupit, ce silence des bois,
Mêlent une souffrance au rêve de l’espace
Et comme un douloureux souvenir d’autrefois ;

Mais ce bateau sombré sous l’herbe, morne épave
D’un passé radieux que le temps a vaincu,
Anime vaguement le parc muet et grave :
Dans ces lieux désolés on sent qu’il a vécu.

Au long des bords fleuris comme il glissait sans trêve !
Il est pris maintenant par l’immobilité :
La vie autour de lui s’agite comme un rêve,
Sans réveiller son vol à jamais arrêté.