Page:Janin - L’Âne mort, 1842.djvu/225

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d’un pas solennel. Sylvio connaissait l’honnête magistrat, qui nous permit de pénétrer dans ce lieu funeste. Tout y était en désordre ; les habitantes de l’endroit, pâles et échevelées, étaient assises sur leur grabat et s’entre-regardaient d’un air hébété ; leurs tristes compagnons de débauche, tout honteux d’être surpris par la foule, dans un si triste appareil, se cachaient le visage ; — hypocrites, qui tenaient à leur bonne réputation, et qui voulaient réunir les immondices du vice aux honneurs de la vertu ! Dans la rue se tenait une multitude impatiente d’apprendre le crime et de voir le criminel. Il s’agissait d’un meurtre qui avait été commis durant la nuit ; on en disait déjà des détails horribles, tout le monde frémissait ; moi seul j’eus une espèce de joie infernale en apprenant le nom de la coupable. Oui, c’était elle, c’était bien elle, elle-même qui venait de laver sa faute avec du sang ! Soyez loué, mon Dieu ! qui l’avez sauvée par un crime ! À la fin donc, elle échappait au public, elle n’appartenait plus qu’au bourreau ; à la fin donc, ce monde auquel elle s’était prostituée, n’avait plus sur cette femme que des droits légitimes : il ne pouvait plus lui demander que sa tête, non son corps ! Elle ne sera plus étalée sur la borne à présent, elle ne sera plus exposée que sur l’échafaud !