Page:Janin - L’Âne mort, 1842.djvu/297

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clous à large tête ; au milieu de cette porte s’entr’ouvre une bouche de fer plus redoutable que la Bouche-d’Airain à Venise, car, à coup sûr, quand on jette quelque chose dans cette boîte, c’est une sentence de mort ; au-dessous de cette bouche ouverte est placé un marteau rouillé, car peu de mains y ont touché. La maison est entourée de silence et de terreur. Je frappai ; un domestique vint m’ouvrir ; je fus étonné de sa bonne tournure et de sa physionomie polie. Cet homme me fit entrer dans un beau salon, et alla voir si Monsieur était visible. Resté seul, j’eus tout le temps de parcourir deux ou trois jolies pièces meublées avec beaucoup de soin et de goût. C’étaient les tentures les plus fraîches, les gravures les mieux choisies, les meubles les plus commodes. Des fleurs nouvelles couvraient la cheminée, la pendule représentait un sujet mythologique, Psyché et l’Amour, et elle avançait d’un quart d’heure ; sur le piano ouvert était placée une romance de quelque génie à la mode, soupirs cadencés et fugitifs à l’usage des passions parisiennes ; un joli petit gant de femme était oublié sur le tapis. Dans un petit appartement reculé, un bon peintre avait représenté, se souriant l’un à l’autre, les deux jeunes maîtres de ce frais logis ; je crus un instant que je m’étais trompé de maison.