Page:Janin - L’Âne mort, 1842.djvu/309

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Jenny hésitait. En effet, ce beau linge appartenait à une belle personne innocente et jeune comme un enfant, qui devait se marier dans huit jours. — Mais j’avais l’air si satisfait de ma rencontre, que la bonne Jenny ne s’opposa pas plus longtemps à mes désirs. J’enveloppai avec soin mon riche et chaste linceul, et je partais, lorsque revenant sur mes pas :

— Ce n’est pas tout, dis-je à Jenny ; il me faut encore quelque chose, un linceul plus petit, une espèce de sac...

— C’est donc pour une femme en couches ? me dit Jenny.

Je reculai épouvanté, comme si elle eût eu deviné mon secret : — Une femme en couches ! qui te l’a dit, Jenny ?

— Oui, reprit-elle, je vous comprends : un linceul pour la mère, un linceul pour l’enfant ; et, jetant un regard sur sa taille rebondie, elle ajouta : C’est une bien triste mort !

— Hélas ! oui, ma chère Jenny, une bien triste mort ; on devrait ne pas tuer une femme qui vient d’être mère !

— Ou du moins, reprit Jenny, elle ne devrait mourir que lorsqu’elle n’a plus d’enfant à aimer.

J’ajoutai donc à mon premier linceul une taie d’oreiller à moi,