Page:Janin - L’Âne mort, 1842.djvu/68

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pauvre apparence où se faisait une invasion par autorité de justice ; les spéculateurs remplissaient cette maison. De chaque côté de la rue se voyait étalé l’attirail ordinaire des commerçants ambulants : quelques miroirs tout neufs, de vieux livres de messe ; les plus sales outils de la vie matérielle ; quelques tableaux sans cadres, des cadres sans tableaux ; il s’agissait d’un pauvre diable arrêté pour dettes et dont on faisait vendre tous les meubles, ces meubles de nulle valeur, si précieux pour lui, ce pauvre rien qui faisait tout son avoir, son lit si dur qui fut son lit de noces, la table de bois blanc sur laquelle il écrivait ses livres, le vieux fauteuil qui vit mourir sa grand’mère, le portrait qu’il fit de sa femme avant que cette femme adorée ne suivît son séducteur à Bruxelles, ces bonnes gravures fixées sur le mur avec des épingles : tout cela se trouvait sous la main de la justice. La justice était représentée par une voix criarde et par d’autres voix en faux-bourdon qui mettaient aux enchères. Tout se vendit, jusqu’au petit serin qui était suspendu dans sa cage ; il n’y eut que le chien du digne homme dont personne ne voulut pour rien ; son chien et son enfant restaient dans un coin sans que la justice