Aller au contenu

Page:Janin - L’Âne mort, 1842.djvu/90

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Et Charlot, Henriette ? Savez-vous ce qu’il est devenu, Charlot ?

— Charlot ! Elle me regardait avec une attention trop calme pour être jouée, soit qu’elle cherchât à s’expliquer si elle me connaissait, soit qu’en effet, l’ingrate et oublieuse fille, elle ne se souvînt pas de Charlot. Cet oubli si complet me fendit le cœur.

— Oui, ce pauvre Charlot, repris-je plus ému, le pimpant Charlot, que vous aimiez tant, que vous embrassiez avec transport ; Charlot, cet éveillé Charlot, sur lequel vous galopiez de si bon cœur dans la plaine de Vanves, Charlot le fantasque, qui vous a fait perdre un jour votre chapeau de paille ; le laborieux Charlot qui portait le fumier de monsieur votre père ; l’infortuné Charlot que j’ai vu !… Hélas ! si vous saviez, Henriette, où je l’ai retrouvé, Charlot !

Elle tira de son mouchoir brodé un petit souvenir en maroquin, garni en or, et sans me répondre : — Je quête pour l’œuvre des enfants trouvés ; combien Monsieur me donne-t-il ?

— Rien, Madame.

— Je vous en prie, donnez-leur pour l’amour de moi ; à la dernière quête j’ai eu trois cents francs de plus que Madame de ***, je serais désolée d’être vaincue par elle aujourd’hui.