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LES ÉGOUTS.

où le sang tombe goutte à goutte et dont ils sont les maîtres et seigneurs. U y a parmi ces rats de Montfaucon une aristocratie bien séparée de la populace, et qui a ses privilèges : les uns sont les maîtres de Montfaucon, ils y habitent, ils y vivent, ils y passent leurs nuits et leurs jours ; les autres, moins favorisés du sort, et ne trouvant pas à se loger dans cette terre promise des asticots, du sang pourri et des charognes, s’en vont se loger où ils peuvent dans les faubourgs de l’infection. Chaque jour, à la même heure, ils accourent à la voirie, où les attend leur charogne quotidienne ; quand ils sont repus ils s’en retournent ; et leur nombre est si immense qu’ils ont laissé après eux la trace de leur passage, comme a fait l’armée d’Annibal dans les Alpes. D’abord, quand ils sont maîtres d’agir, ils dévorent les yeux du cheval, puis la graisse, puis la rate. En hiver, quand le cadavre est dur, ils pénètrent dans le corps par un certain endroit ; ils s’établissent là-dedans