Page:Jaurès - Action socialiste I.djvu/440

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dation et de rapines, déchaînés au loin par la certitude de l’impunité, et amplifiés par les puissances nouvelles de la spéculation, s’y développent à l’aise : et la férocité sournoise de l’humanité primitive y est merveilleusement mise en œuvre par les plus ingénieux mécanismes de l’engin capitaliste. Tout cela, le socialisme international le dira, ou plutôt le redira sans doute à Londres.

Mais si le Congrès de Londres se bornait à une sorte de déclaration dogmatique, il ferait une œuvre singulièrement vaine. En fait, tous les peuples sont engagés dans la politique coloniale ; et ce ne sont pas nos formules d’avenir qui leur feraient rebrousser chemin ; la loi d’expansion et de conquête à laquelle ils cèdent tous semble irrésistible comme une loi naturelle ; et nous aurons beau dénoncer toutes les vilenies, toutes les corruptions, toutes les cruautés du mouvement colonial, nous ne l’arrêterons pas : le fleuve humain n’attend pas pour couler d’avoir été filtré par nous. Ceux qui, comme nous, se réclament du principe socialiste doivent se garder de toute responsabilité dans les effets du principe capitaliste ; mais ils n’imaginent pas naïvement que la société capitaliste, tant qu’elle subsistera, désobéisse à sa propre loi. Quelle doit donc être, dans ces questions si redoutables pour la paix du monde et pour le socialisme international, l’attitude pratique des socialistes ?