Page:Jaurès - Histoire socialiste, II.djvu/166

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sans doute de scandaliser les ouvriers qui l’écoutaient, de signaler la lutte, si glorieuse pourtant, que soutint Robespierre contre les entraînements belliqueux ! Et il semble accepter cette « guerre de propagande » à laquelle Robespierre opposait de si fortes objections.

Ainsi, le torrent éblouissant et trouble où la Gironde a mêlé les flots de la Révolution et les flots de la guerre s’est creusé un lit jusque dans la conscience de roc des montagnards et de leurs héritiers.

C’est peut-être parce que la paix, l’harmonie internationale, nous apparaît à nous comme une condition absolue de l’avènement prolétarien et de la révolution sociale que nous portons jusque dans le passé, jusque dans la révolution de la démocratie bourgeoise ce parti pris de paix.

Ce serait fausser le sens de l’histoire que de substituer notre sensibilité à celle des hommes de 92, mais en signalant ce qu’il y eut dès lors, dans la politique belliqueuse, d’intrigues, de sophismes et d’obscur énervement, nous préserverons peut-être les générations nouvelles des déclamations héroïques et vaines qui ne propagent plus que les haines ineptes ou basses et l’esprit de réaction.

Comme conclusion à tous ces débats de janvier, l’Assemblée rendit dans la séance du 25, un décret qui ressemblait vraiment à une déclaration de guerre :

I. — « Le roi sera invité, par un message, à déclarer à l’empereur qu’il ne peut désormais traiter avec aucune puissance qu’au nom de la nation française, et en vertu des pouvoirs qui lui sont délégués par la Constitution.

II. — « Le roi sera invité à demander à l’empereur si, comme chef de la maison d’Autriche, il entend vivre en paix et en bonne intelligence avec la nation française, et s’il renonce à tout traité et convention dirigés contre la souveraineté, l’indépendance et la sûreté de la nation.

« III. — Le roi sera invité à déclarer à l’empereur qu’à défaut par lui de donner à la nation avant le 1er mars prochain, pleine et entière satisfaction sur les points ci-dessus rapportés, son silence, ainsi que toute réponse évasive et dilatoire, seront regardés comme une déclaration de guerre.

« IV. — Le roi sera invité à continuer de prendre les mesures les plus promptes pour que les troupes françaises soient en état d’entrer en campagne au premier ordre qui leur en sera donné.

« L’Assemblée nationale charge son comité diplomatique de lui faire incessamment son rapport sur le traité du 17 mai 1756. »

Comme pour souligner le sens guerrier de ce décret, le maréchal de Rochambeau, commandant d’un des trois corps, prit séance ce même jour à l’Assemblée. Il lui demanda diverses mesures d’ordre militaire, et il termina par ces mots chaleureusement applaudis : « J’espère, messieurs, que par le fruit de vos déclarations, vous voudrez bien aider et soutenir le zèle qui