Page:Jaurès - Histoire socialiste, III.djvu/82

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feuillants. Il n’en voulait pas ou presque pas à leur vie ; mais il aurait désiré en supprimer d’un coup toutes les chances de pouvoir.

Le plan n’aboutit pas, et la Gironde dans l’ensemble échappa au coup. Les Girondins ne furent pas élus à Paris ; mais leur influence resta grande en France. Ce n’est pas que la Commune révolutionnaire de septembre ait manqué d’audace. Les perquisitions chez Brissot et le mandat d’arrêt contre Roland sont des traits hardis. De plus, dès le soir du 3 septembre, la Commune lançait à toute la France révolutionnaire un appel où elle annonçait bien haut son intention de garder le pouvoir pour le salut de la Révolution. Et elle se donnait comme l’organe de la volonté nationale. Elle s’élevait au-dessus des décrets de l’Assemblée :

« Après les témoignages que l’Assemblée nationale venait de lui donner elle-même, eût-on pensé que dès lors de nouveaux complots se tramaient dans le silence et qu’ils éclataient dans le moment même où l’Assemblée nationale, oubliant qu’elle venait de déclarer que la Commune de Paris avait sauvé la patrie, s’empressait de la destituer pour prix de son brûlant civisme ? À cette nouvelle, les clameurs publiques ont fait sentir à l’Assemblée nationale la nécessité urgente de s’unir au peuple, et de rendre à la Commune, par le rapport du décret de dissolution, les pouvoirs dont elle l’avait investie.

« Fière de jouir de toute la plénitude de la confiance nationale, qu’elle s’efforcera de mériter de plus en plus, placée au foyer de toutes les conspirations et déterminée à périr pour le salut public, elle ne se glorifiera d’avoir rempli pleinement son devoir que lorsqu’elle aura obtenu votre approbation, qui est l’objet de tous ses vœux, et dont elle ne sera certaine qu’après que tous les départements auront sanctionné ses mesures pour le salut public ; et professant les principes de la plus parfaite égalité, n’y trouvant d’autre privilège que celui de se présenter la première à la brèche, elle s’empressera de se soumettre au niveau de la commune la moins nombreuse de l’empire, dès qu’il n’y aura plus rien à redouter.

« Prévenue que des hordes barbares s’avancent contre elle, la Commune de Paris se hâte d’informer ses frères de tous les départements qu’une partie des conspirateurs féroces détenus dans les prisons ont été mis à mort par le peuple ; actes de justice qui lui ont paru indispensables pour retenir par la terreur les légions de traîtres renfermés dans ses murs, au moment où il allait marcher à l’ennemi, et sans doute la nation, après la longue suite de trahisons qui l’a conduite sur les bords de l’abîme, s’empressera d’adopter ce moyen si utile et si nécessaire, et tous les Français se diront comme les Parisiens : « Nous marchons à l’ennemi et nous ne laisserons pas derrière nous des brigands pour égorger nos femmes et nos enfants.

« Signé : Duplain, Panis, Sergent, Lenfant, Marat, Lefort, Jourdeuil,
« Administrateurs du Comité de salut public constitué à la mairie. »