Page:Jaurès - Histoire socialiste, IV.djvu/391

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membres, mais toujours pénétrés d’un esprit révolutionnaire ardent ; seuls étaient éligibles ceux qui faisaient la preuve qu’ils n’avaient jamais appartenu à un club feuillant, ou signé les pétitions des huit mille et des vingt mille. Nés de la Révolution, c’étaient des organes de Révolution. Et à mesure que la Révolution s’exaltait, passait des influences girondines aux influences de la Montagne, les comités de surveillance s’exaltaient et se passionnaient avec elle. Ni le cordonnier révolutionnaire Lhuilier n’aurait été élu procureur syndic du département, ni Pache n’aurait été élu maire de Paris, ni Hébert et Chaumette n’auraient occupé les postes de procureur et de substitut de la Commune si les comités de surveillance, qui exprimaient tout ensemble et dirigeaient les sections, n’avaient abondé dans le sens d’une politique de vigueur et d’action.

Ainsi s’élaborait et se constituait toute une forte administration révolutionnaire. Ainsi les patriotes les plus véhéments s’habituaient à commander, à surveiller, à agir. Ainsi ils acquéraient, dans les limites assez étroites de la section, la connaissance des hommes et des choses, cette sûre information de détail qui permet aux heures de crise les décisions rapides. Et l’ambition, l’action de ces comités de surveillance s’élargissaient avec les événements, se passionnaient avec la Révolution.

Quand, dans les premiers jours de mai, le péril s’aggrave, quand le vent de défaite se lève de nouveau, quand d’inquiétants symptômes de trahison annoncent les catastrophes prochaines, les sections les plus ardentes décident spontanément de donner à leur comité de surveillance un caractère plus nettement révolutionnaire et un pouvoir plus direct. Il ne suffit pas de dresser des listes de suspects qui seront transmises à la Commune. Qu’adviendra-t-il, en un jour de crise où les événements se précipitent, où les heures et les minutes comptent, si des suspects, continuant à intriguer en liberté, donnent le signal du massacre des patriotes, livrent un quartier de la ville à des rassemblements d’émigrés jetant soudain le masque, et arborant les insignes de la trahison ?

Il faut qu’à l’action rapide du tribunal révolutionnaire créé le 9 et le 10 mars réponde la rapidité d’action des sections pourvoyeuses. Dans la section de la Croix-Rouge, l’assemblée générale décrète le 13 mars 1793 :

« Considérant que la Convention nationale a trouvé nécessaire de créer, dans ces circonstances difficiles, un tribunal révolutionnaire pour juger les ennemis de la patrie, que ce tribunal pourrait n’être que d’un effet peu sensible si la majeure partie de ses ennemis lui échappait, qu’il faut que tous les bons citoyens se mettent en état de les attendre, et qu’un des moyens pour réussir est d’exercer la plus exacte surveillance, la section a créé dans son sein un Comité révolutionnaire. »

Ce comité, composé de sept membres, et se renouvelant chaque mois par moitié, se réunira tous les jours et il recevra « toutes les dénonciations signées