Page:Jaurès - Histoire socialiste, IV.djvu/516

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sagesse, nous les surpasserons en audace et en vigueur révolutionnaire », s’attarde encore à cette entreprise désespérée de rapprochement.

M. Bonnarel a noté (et cette remarque est une sorte de découverte), que lui qui n’écrivait presque jamais, il avait, cette fois, collaboré au rapport de Barère, qu’il y avait inséré les appels les plus pressants, les plus éloquents, à l’union, à la paix. Le témoignage du « Républicain, journal des hommes libres de tous les pays », en son numéro du 30 mai 1793, est décisif à cet égard :

« Barère présenta ensuite le rapport général du Comité de salut public sur notre situation intérieure et extérieure. Il est trop étendu pour qu’une analyse rapide puisse satisfaire nos lecteurs ; nous voulons qu’ils en jouissent pleinement ; mais nous annoncerons cependant aujourd’hui que c’est à ce Danton si calomnié, si souvent dépeint sous les couleurs les plus atroces, que l’on doit le paragraphe où le Comité fait sentir la nécessité d’une constitution républicaine, de l’établissement des écoles primaires, du raffermissement des propriétés, du retour de l’ordre, du règne des lois et de la morale, et surtout de l’étouffement de ces passions qui divisent les représentants d’un même peuple et ne font du palais de l’unité que le temple de la discorde. »

Le témoignage de Cambon, comme le remarque M. Bonnarel, confirme celui du Républicain. C’est Ducos qui, dans la Chronique de Paris du 31 mai, le signale en ces termes :

« Des applaudissements avaient accueilli un passage lu par Barère : « Ce morceau que vous venez d’entendre, s’écria Cambon, a cependant été écrit par un homme calomnié, par Danton. »

Barère, dans ses Mémoires où il accable Danton, s’est bien gardé de rappeler cette collaboration. Elle n’en est pas moins certaine. Donc Danton disait, avec cette sorte de faste qui se mêlait parfois à la vigueur de son éloquence :

« En entrant dans cette enceinte du local où siège l’Assemblée, l’étranger comme le citoyen sont frappés par cette inscription sublime qui seule est une Constitution, qui comprend tous nos devoirs, qui ranime l’espoir qui doit nous animer, qui exalte le courage que vous devez apporter dans vos travaux et qui doit faire pâlir les tyrans de l’Europe. Le mot Unité qui est inscrit sur la porte du Palais national devrait être aperçu de tous les départements et gravé dans le cœur de leurs députés.

« L’unité de 25 millions d’hommes, l’unité de tant de volontés doit vous rendre invincibles.

« Mais cette inscription sera-t-elle donc toujours mensongère ? Verra-t-on sans cesse dans le palais de l’Unité, les fureurs de la discorde et 40 000 petites républiques y agitant leurs dissensions par des représentants ?

« Faites donc disparaître les images de ces Lycurgue, de ces Solon, de ces Brutus, l’honneur et l’appui de leur patrie ; substituez à des images véné-