Page:Jaurès - Histoire socialiste, IV.djvu/543

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duisit les titres et mandats des délégués. Il résulta du dépouillement « que 33 sections avaient donné des pouvoirs illimités à leurs commissaires pour sauver la chose publique ». C’étaient les sections des Arcis, Bondy, Tuileries, Faubourg-du-Nord, Panthéon, Fontaine-de-Grenelle, Unité, Gravilliers. Quinze-Vingts, Popincourt, Marseille, Réunion, Faubourg-Montmartre, Quatre-Vingt-Douze, la République, Montrouge, Marchés, Halle-au-Blé, Montreuil, Piques, Amis-de-la-Patrie, Contrat-Social, Marais, Bonne-Nouvelle, Luxembourg, Pont-Neuf, Sans-Culottes, Temple, Arsenal, Bon-Conseil, Lombards, Droits-de-l’Homme, Cité.

Après cette vérification des pouvoirs, Chaumette proclame que le vœu de la majorité des sections est évident, et il demande que le Conseil général remette ses pouvoirs au peuple souverain. Dobsent prend le fauteuil. C’est, par lui, l’assemblée révolutionnaire qui s’installe, avec une sorte de légalité, à l’Hôtel de Ville :

« Citoyen président, leur dit Destournelles, et vous, citoyens membres de la Commission révolutionnaire agissant au nom du peuple, vos pouvoirs sont évidents ; ils sont légitimes. C’est maintenant que, sans faiblesse et sans honte, nous allons cesser nos fonctions. Puisque le peuple l’ordonne, nous le devons ; qu’il nous soit seulement permis, au moment où nous descendons de nos sièges, de vous demander, non une faveur, mais une justice.

« Rendez-nous le témoignage que nous trouvons dans nos consciences, que depuis que nous sommes en place nous avons montré constamment l’assiduité au travail, le zèle, le courage et même la dignité que nous ont commandée les circonstances difficiles où nous nous sommes trouvés.

« Que d’autres, avec plus de lumière et plus de talent, remplissent mieux ce que le peuple a droit d’exiger dans l’état présent des choses, c’est l’objet de nos vœux les plus ardents ; mais déclarez que nous n’avons pas démérité de nos concitoyens, et il n’est rien dont ne nous console et ne nous dédommage cette récompense, digne salaire de tous bons magistrats du peuple. »

Dobsent proclame « au nom du peuple » que les pouvoirs de la municipalité sont annulés. Les membres de l’ancien Conseil général de la Commune et ceux du Conseil révolutionnaire provisoire se lèvent dans un même élan d’enthousiasme ; tous, municipaux dont le mandat vient d’être brisé, délégués des sections, s’embrassent fraternellement pour attester qu’il n’y a ni dépit d’amour-propre chez les uns, ni orgueil de domination chez les autres, tous ensemble ils prêtent un serment civique fort, modéré et grave, destiné à calmer les appréhensions des timides, à rassurer et à entraîner tout le pays :

« Je jure d’être fidèle à la République une et indivisible, de maintenir de tout mon pouvoir et de toutes mes forces la sainte liberté, la sainte égalité, la sûreté des personnes et le respect des propriétés, ou de mourir à mon poste en défendant, les droits sacrés de l’homme. Je jure, de plus, de vivre