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Page:Jaurès - Histoire socialiste, IV.djvu/795

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seule semblait avoir fait tous les frais ; deux termes, symboles de l’Égalité et de la Liberté, ombragés par un épais feuillage, séparés et en face l’un de l’autre, tenaient, à une distance proportionnée, une guirlande tricolore et tendue à laquelle était suspendu un vaste niveau, le niveau national : il planait sur toutes les têtes indistinctement : orgueilleux, vous avez courbé la tête !

« Arrivés dans le Champ-de-Mars, le président de la Convention nationale, la Convention nationale, les quatre-vingt-six commissaires des envoyés des assemblées primaires, les envoyés des assemblées primaires ont monté les degrés de l’autel de la patrie. Pendant ce temps, chacun a été attacher son offrande au pourtour de l’autel, les fruits de son travail, les instruments de son métier ou de son art. C’est ainsi qu’il s’est trouvé plus magnifiquement paré que par les emblèmes recherchés d’une futile et insignifiante peinture ; c’est un peuple immense et laborieux qui fait hommage à la patrie des instruments de son métier avec lesquels il fait vivre sa femme et ses enfants.

« Cette cérémonie terminée, le peuple s’est rangé autour de l’autel ; là, le président de la Convention nationale, ayant déposé sur l’autel de la patrie tous les actes de recensement des votes des assemblées primaires, le vœu des Français sur la Constitution a été proclamé en présence de tous les envoyés du Souverain, et sous la voûte du ciel.

« Le peuple a fait serment de la défendre jusqu’à la mort ; une salve générale a annoncé cette sublime prestation ; le serment fait, les quatre-vingt-six commissaires des assemblées primaires se sont avancés vers le président de la Convention ; ils lui ont remis chacun la portion du faisceau qu’ils ont portée à la main tout le temps de la marche ; le président s’en est saisi, il les a rassemblées toutes ensemble avec un ruban tricolore ; puis il a remis au peuple le faisceau étroitement uni en lui représentant qu’il sera invincible s’il ne se divise pas ; il lui a remis aussi l’arche qui renferme la Constitution ; il a prononcé à haute voix : « Peuple, je remets le dépôt de la Constitution sous la sauvegarde de toutes les vertus. » Le peuple s’en est emparé respectueusement et il l’a porté en triomphe, et des baisers mille fois répétés ont terminé cette scène nouvelle et touchante.

« Citoyens, n’oublions pas les services glorieux qu’ont rendus à la patrie nos pères morts pour la défense de la liberté. Après avoir confondu nos sentiments fraternels dans de vastes enlacements, il nous reste un devoir sacré à remplir, celui de célébrer par des hymnes et des cantiques le trépas de nos pères. Le président de la Convention nationale a remis au peuple l’urne cinéraire, après l’avoir couronnée de lauriers sur l’autel de la patrie. Le peuple majestueusement s’en est emparé ; il ira la déposer dans l’endroit désigné pour y être élevé par la suite une superbe pyramide. Le terme de toutes ces cérémonies a été un banquet superbe : le peuple, assis frater-