Page:Jaurès - Histoire socialiste, IV.djvu/914

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ceux qui veulent le mouvoir uniquement pour s’en servir, rappelez-vous qu’il fut chassé, rayé par les patriotes, et qu’un homme, égaré sans doute… autrement je ne saurais comment le qualifier, se trouva là fort à propos pour le réintégrer malgré la volonté du peuple, qui s’était bien exprimée sur ce traître…

Ah ! je dévoilerai tous les complots ! Comment est composé le ministère ? Un Paré ! Un Paré ! D’où vient-il ? Comment est-il parvenu ministre de l’intérieur ? On ne sait par quelles intrigues ! Un Desforgues ! »

Vincent : « Un Destournelles, insignifiant, instrument passif ! »

Et Hébert annonce que la faction va composer un ministère ultra-modéré. Mais qu’importent d’ailleurs ces indices nouveaux ? L’impunité assurée aux traîtres ne suffit-elle point à accuser la faction ?

« Hé bien ! puisque la faction existe, puisque nous la voyons, quel est le moyen de vous en délivrer ? l’insurrection. Oui, l’insurrection, et les Cordeliers ne seront pas les derniers à donner le signal qui doit frapper à mort les oppresseurs (Vifs applaudissements). »

C’est le compte rendu du Moniteur ; il est confirmé par des rapports de police nombreux et concordants.

Était-ce une velléité insurrectionnelle, et une menace ? Ou bien y avait-il un plan d’insurrection arrêté, avec des moyens d’exécution préparés ? Il est malaisé de le savoir quand un parti a un chef aussi inconsistant, aussi médiocre d’intelligence et de cœur, aussi versatile et couard que l’était Hébert. Cet homme, qui haïssait Robespierre et qui rêvait de le détruire, était blême de peur devant lui. Pas une fois il ne lui fit front aux Jacobins. Et maintenant encore, en plein cœur des Cordeliers, il n’a que des paroles évasives et de peureuses réticences. Il paraît n’avoir eu aucun système un peu lié, aucune tactique suivie. Quand se pose devant les Jacobins la grande question des sociétés affiliées, il fait platement sa cour aux vieux Jacobins en abandonnant les sociétés récentes comme suspectes d’intrigue. Or, il en était beaucoup qui avaient surgi depuis le 31 mai et qui, nées en quelque sorte de l’insurrection, pouvaient être les outils de l’insurrection nouvelle.

Dufourny, qui détestait l’hébertisme, avait, lui, le sentiment de ce danger, et il disait, le 27 janvier, aux Jacobins :

« J’ai déjà dit ce qu’il fallait penser des sociétés sectionnaires de Paris qui s’isolent dans un petit arrondissement. De même que chaque faux patriote a sa carte de citoyen, des patentes de tous les pas qu’il a faits ou qu’il n’a pas faits dans la Révolution, de même les intrigants des sections ont voulu avoir des sociétés. Elles n’ont pas demandé l’affiliation ; elles ont voulu former un Comité central à l’Évêché en opposition à la société des Jacobins. Citoyens, ayez les yeux ouverts sur ces sociétés sectionnaires et sur leur projet de Comité central. »

Si ces sociétés s’étaient affiliées, elles pouvaient transformer l’esprit jaco-