Page:Jaurès - Histoire socialiste, IX.djvu/343

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avec la Sardaigne, le Portugal, tâchent d’abriter de la contrefaçon la production littéraire et artistique. Des primes encouragent l’exportation et le Message présidentiel du 12 Novembre 1850 constate que la création d’établissements industriels a repris son mouvement. Voici, en effet, le nombre de ceux qui sont nés dans le premier semestre des quatre dernières années :

1847 : 92. — 1848 : 68. — 1849 : 65. — 1850 : 89

Un autre fait vint prouver la vitalité persistante, la vigoureuse élasticité de l’industrie française. Ce fut l’Exposition de 1849, à Paris. Elle faillit être internationale ; l’idée fut agitée dans le Conseil des ministres. Mais ce qui avait un caractère international était à ce moment fort peu en faveur auprès de la classe bourgeoise. On craignit d’alarmer les intérêts ; on se contenta d’une Exposition nationale. Elle fut signalée, non par des œuvres de luxe et d’apparat, mais par la bonne tenue des articles courants, des objets utiles. Il y eut 4.532 exposants, 1/10 de plus qu’en 1844. Elle occupa une superficie ayant 3.000 mètres carrés de plus que la précédente. On y remarqua : des progrès dans la métallurgie, progrès nécessités par la fabrication des rails, des locomotives, des machines à vapeur : une invention récente liée intimement aux chemins de fer, la télégraphie électrique, qui faisait déjà marcher des horloges et qui allait être appliquée aux communications entre particuliers ; les phares de Fresnel destinés à rayonner sur toutes nos côtes ; la peigneuse Heilmann, qui supprimait les poussières si dangereuses éparpillées dans l’air par le peignage du coton et de la laine, mais qui, hélas ! comme toute machine nouvelle, supprimait aussi le gagne-pain d’un bon nombre d’ouvrières.

L’industrie française, encouragée par cette revue d’elle-même qu’elle venait de passer, prit part à l’Exposition universelle qui eut lieu à Londres en 1851. Cette première foire du monde, organisée par la nation qui avait alors sans conteste le premier rang dans la fabrication industrielle et qui avait été l’initiatrice des autres peuples en cette matière, était comme la reconnaissance officielle de ce marché international que la production mécanique rendait nécessaire et que la vapeur appliquée aux voies de communications rendait possible. Les Français n’y firent pas trop mauvaise figure. Ils y furent peu nombreux ; mais ils obtinrent beaucoup de médailles. Ils vinrent, dans la liste des récompenses, immédiatement après la Grande-Bretagne et c’était l’expression de la vérité. La France en ce moment était au second rang, quoique assez loin de l’Angleterre, pour l’importance des affaires et la quantité des produits manufacturés.

Ainsi l’activité productrice de la France avait repris son cours et sans trop de retard, parce que la crise avait été générale en Europe. L’évolution interrompue se continuait dans le sens où elle se dirigeait avant la Révolution, je veux dire qu’elle était orientée vers la transformation mécanique des usines et le développement de la grande industrie capitaliste, mais avec une