Page:Jaurès - Histoire socialiste, V.djvu/28

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cette affaire ». Ils n’obtinrent pas de réponse et écrivirent de nouveau que, si le prochain courrier ne leur apportait pas les renseignements demandés, ils relâcheraient Babeuf ; n’ayant rien reçu, ils mettaient, le 17 frimaire (7 décembre), celui-ci en liberté provisoire sous le cautionnement, a-t-il dit, de « Sylvain Maréchal, Daube et Thibaudeau, mes amis » : il sera question du premier plus tard (chap. xiii) ; Daube était un professeur de législation natif de la région qui constitua le département des Hautes-Pyrénées, et devait être choisi, en germinal an IV (avril 1796), pour occuper la chaire de législation à l’école centrale de Tarbes ; Thibaudeau était évidemment le Conventionnel ; je constaterai que, dans le logement où fut arrêté Babeuf au moment de sa conjuration, on ne trouva, parmi les documents saisis, qu’une douzaine d’imprimés étrangers à cette conjuration ; or, l’un d’eux était le rapport du Conventionnel Thibaudeau sur la mission par lui remplie près de l’armée des côtes de la Rochelle (Copie des pièces saisies dans le local que Babeuf occupait lors de son arrestation, t. II, p. 70.).

Babeuf demanda à être réintégré dans ses fonctions à l’administration des subsistances et, en attendant, grâce à Sylvain Maréchal, il travailla chez Prudhomme, l’éditeur du journal Les Révolutions de Paris. Avant de lui rendre sa place, la commission des subsistances résolut de consulter le ministre de la Justice Gohier. Ce dernier exprima l’opinion qu’un condamné devait être arrêté et donna des ordres en conséquence. Sans avis officiel, Babeuf se rendit de lui-même, le 11 pluviôse (30 janvier 1794), à l’Abbaye où il fut incarcéré ; on devait, le 1er germinal (21 mars), le transférer à Sainte-Pélagie.

Babeuf rédigea pour sa défense, d’après une note du dossier, un mémoire qui, actuellement, n’y figure pas. Ce mémoire n’est pas autre chose — les nombreux renvois concordant des notes biographiques qui sont dans le dossier, aux pages de cet imprimé l’établissent d’une manière incontestable — que l’imprimé débutant par ces mots : « Babeuf, ex-administrateur du département de la Somme et successivement du district de Montdidier aux comités de salut public, de sûreté générale et de législation de la Convention nationale, et à Gohier, ministre de la Justice ». Une note manuscrite de l’exemplaire de la Bibliothèque nationale (Lb 41/947) permet de supposer que c’est cet exemplaire qui a appartenu au dossier. Dans cette brochure écrite en pluviôse an II (février 1794), Babeuf annonce qu’il écrira une « défense générale », un « grand mémoire ». Tel que nous le connaissons, nous pouvons affirmer que cette promesse d’écrire a été tenue. Qu’est devenu cet écrit ? Je n’en ai pas trouvé trace, si ce n’est pas l’ouvrage « préparé pour l’impression » et « resté inédit » que, dans son Histoire de Gracchus Babeuf, — intéressante par les documents nouveaux apportés, mais malheureusement incomplète et parfois inexacte, — M. Advielle mentionne (t. 1er, p. 505) sous le titre Histoire des conspirations et des conspirateurs du département de la Somme. À pro-