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mais ces machines agricoles et diverses autres, telles que semoir, hache-paille, étaient alors, en dehors même de tout esprit de routine, généralement jugées trop imparfaites et trop coûteuses.

La pomme de terre s’implanta durant notre période dans le Midi où elle n’était guère utilisée auparavant (de Pradt, De l’état de la culture en France t. Ier, p. 74). Le vin était très médiocre dans beaucoup de régions qui cultivaient la vigne, et la culture de celle-ci se développa par suite de l’augmentation du prix des vins (bulletin souvent cité déjà de la Société libre d’agriculture du Gers). L’huile dont il était fait une grande consommation, provenait dans le Midi de l’olive, dans le Nord du pavot et du colza. Les plants de mûrier que le Midi soignait assez bien pour les vers à soie, auraient pu être plus abondants. Partout la production des fruits, du lin et du chanvre aurait pu être beaucoup plus étendue de Pradt, ibid., p. 164 et-165).

Les prairies naturelles étaient en mauvais état parce qu’on ne les labourait jamais, alors que, dit de Pradt (t. Ier, p. 142), « toute prairie qui n’est pas dans un très bon fonds ou susceptible d’arrosements réguliers, doit, pour se soutenir en bon rapport, être retournée tous les douze ans », et parce qu’on ne savait pas les irriguer, les unes recevant trop d’eau et les autres pas assez. Généralement la culture était meilleure au Nord qu’au Midi, la plus mauvaise était dans le Centre ; ce qui sauvait le Midi, c’était l’olivier, le mûrier et la vigne.

Il ne restait plus guère, à cette époque, de ces grandes fermes de 250 hectares pour lesquelles, suivant Rozier (Cours d’agriculture, t. II, p. 121), « les avances du fermier doivent être de 16 à 17 000 livres, sans compter ce qu’il doit dépenser avant de toucher un grain de la première récolte, et ses dépenses montent à plus de 2 000 livres ». Les fermiers de cette catégorie ne tenaient pas la charrue, ils prévoyaient les travaux à faire, en surveillaient l’exécution, s’occupaient de l’achat des choses nécessaires et de la vente des produits. Après la Révolution, « des fermes de 200, 300, 400 arpents (environ 100, 150, 200 hectares) exploitées chacune par un fermier, ont été divisées en 20, 30, 40 et 60 corps de fermes » (Annales de l’agriculture, t. Ier, p. 13). L’étendue des fermes dépassait rarement 100 hectares ; les plus nombreuses allaient de 20 à 25 (Sagnac, La législation civile de la Révolution française, p. 241, note). En l’an V (1797), d’après le Journal des arts et manufactures (t. III, p. 483), il y avait dans le Cher des métairies de 50 à 170 hectares. Le maximum le plus ordinaire de la durée des baux était de neuf années (Décade philosophique, t. II, p. 205 ; Annales de l’agriculture, t. III, p. 283 ; de Pradt, t. Ier, p. 174 et Nouveau cours complet d’agriculture, d’après Rozier, t. II, p. 177). La baisse des assignats avait été, pour les fermiers payant le prix de leur fermage avec cette monnaie dépréciée, une source de profits inespérés ; ce fut au point qu’on vit des fermiers payer leur fermage avec le papier que