Page:Jaurès - Histoire socialiste, V.djvu/432

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l’Oise), de la Rue, Pichegru, Willot, du Conseil des Cinq-Cents, Ramel, qui commandait la garde du Corps législatif, Dossonville, le policier devenu le « directeur de la police secrète » des conjurés des deux Conseils (Histoire secrète du Directoire de Fabre (de l’Aude), t. III, p. 211), et les conspirateurs royalistes Brothier et La Ville-Heurnois. Devaient y être transportés par la suite Gibert-Desmolières arrêté le 25 fructidor an V (11 septembre 1797) et J. J. Aymé arrêté seulement le 16 nivôse an VI (5 janvier 1798), tous les deux des Cinq-Cents. Le 15 prairial an VI (3 juin 1798) sept déportés et le domestique de Barthélémy, évadés, avaient gagné le territoire de la Guyane hollandaise ; Aubry et le domestique moururent peu après l’évasion ; les six autres, Pichegru, de la Rue, Ramel, Dossonville, Willot et Barthélémy débarquaient en Angleterre, les quatre premiers le 21 septembre 1798, les deux autres plus tard. Barbé-Marbois et Laffon de Ladébat devaient être graciés le 6 fructidor an VII (23 août 1799) et Aymé s’évada le 2 brumaire an VIII (24 octobre 1799), ce qui démontre que neuf survécurent à leur déportation, alors que M. Taine, dont on vante tant la documentation, n’en compte que deux dans ce cas (Pierre, 18 Fructidor, p. xxii).

Des commissions militaires avaient été instituées pour juger les émigrés trouvés sur le territoire français après un délai déterminé. « Du mois d’octobre 1797 au mois de mars 1799, c’est-à-dire dans l’espace de 18 mois, les commissions militaires ont siégé, en outre de Paris, dans 31 villes et prononcé environ 160 condamnations à mort » (Pierre, idem, p. xxiv) ; sur ce nombre, on compte 41 ecclésiastiques » (Id. p. xxxiv). Quant aux prêtres français déportés, il y en eut (Sciout, Le Directoire, t. III, p. 154) 1448 en l’an VI et 209 en l’an VII. Tels sont les résultats de la répression, d’après deux historiens favorables aux royalistes et aux catholiques.

Pour justifier son coup d’État, approuvé sur le moment par des modérés tels que Benjamin Constant et Mme de Staël, — elle devait trouver plus tard qu’on était allé trop loin ; dans ses Considérations sur les principaux événements de la Révolution française, elle a écrit (t. II, p. 182) : « Le changement de ministère et les adresses des armées suffisaient pour contenir le parti royaliste, et le Directoire se perdit en poussant trop loin son triomphe » ; suivant le mot de Lavallette (Mémoires et souvenirs, t. Ier, p. 235), « elle n’avait pas prévu les proscriptions cruelles qui accablèrent le parti vaincu, mais je n’ai jamais vu une telle chaleur à les poursuivre », — le Directoire dénonça la conspiration royaliste et publia, à l’appui de sa dénonciation, divers documents provenant notamment de d’Antraigues. Moreau avait de son côté, le 2 floréal an V (21 avril 1797), après avoir culbuté l’ennemi lors de son passage du Rhin, saisi dans un fourgon de l’émigré de Klinglin devenu général de l’armée autrichienne, une volumineuse correspondance de Pichegru et autres avec le prince de Condé, Wickham, etc. Ami de Pichegru, il ne l’avait pas communiquée au Directoire dont les adversaires modérés avaient, d’ail-