Page:Jaurès - Histoire socialiste, V.djvu/435

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millions 800 mille livres de rente sur le Grand-Livre, qui, aujourd’hui, feraient un capital de 236 millions valeur réelle, tandis que la valeur originaire n’est peut-être pas le vingtième de cette somme » (t. Ier, p. 284).

Par la loi du 9 vendémiaire an VI (30 septembre 1797) que compléta, pour l’organisation du mode de remboursement, celle du 24 frimaire (14 décembre 1797), les deux tiers de chaque inscription de rentes furent rayés du Grand-Livre. Les porteurs de rente perpétuelle devaient recevoir, à la place, des « bons au porteur délivrés par la Trésorerie nationale » et admis, pour une valeur 20 fois plus grande que le montant en rentes de ces deux tiers, en payement des 5/10 du prix des biens nationaux payables, « conformément aux lois subsistantes », avec la dette publique (voir première moitié du chapitre xv) ; de plus, le tiers de l’inscription conservé au Grand-Livre était admis en payement des 5/10 payables en numéraire. Ces bons n’exprimaient que le chiffre des deux tiers de rentes qu’ils remplaçaient et étaient échangeables contre des biens nationaux à raison de 20 fois ce chiffre ; dès lors, quand on constate que leur cours était, en nivôse an VI (décembre 1797-janvier 1798), 2 livres 16 sous et, en germinal an VI (mars-avril 1798), 1 livre 18 sous pour 100, cela signifie que telle était la dépréciation, non du capital, mais du revenu ou, en d’autres termes, du vingtième du capital. Si cela n’en dissimulait pas moins fort mal une banqueroute très réelle pour toutes les inscriptions autres que celles si impudemment exagérées au profit des fournisseurs, il ne faut cependant pas oublier que, tandis que l’ancien fonds clôturait, le 17 nivôse an VI (6 janvier 1798), en légère hausse, à un peu moins de 7 fr., le nouveau ouvrait à la Bourse du 21 nivôse (10 janvier) à 17 fr., c’est-à-dire avec une hausse de 10 fr. après la réduction des deux tiers et, le surlendemain, il dépassait le cours de 24 fr. Ce tiers restant prit le nom de « tiers consolidé », avec lequel la loi du 8 nivôse an VI (2s décembre 1797) constitua un nouveau Grand-Livre. L’article 110 de la loi du 9 vendémiaire voulut au moins garantir le payement des rentes réduites et des pensions en leur réservant certaines recettes : « Le produit net des contributions administrées par la régie de l’enregistrement, et subsidiairement les autres contributions indirectes, sont et demeurent spécialement affectés, jusqu’à due concurrence, au payement des rentes conservées et pensions ».

Mais ce devait être pour les rentiers une garantie plus nominale que réelle, comme cela avait déjà été le cas avec la loi du 15 vendémiaire an V (6 octobre 1796), qui avait ordonné « la distraction du sixième net de toutes les sommes qui proviendront de la perception des revenus et contributions ordinaires, pour l’employer au payement des arrérages de rentes et pensions ». J’ai déjà signalé la misère des rentiers (fin du chap. xv). Ces malheureux, après avoir été payés en assignats, puis en mandats, avaient pu espérer, en vertu de la loi du 5e jour complémentaire de l’an IV (21 septembre 1796), toucher un quart de leurs rentes en « numéraire effectif ». Hélas ! la loi du