Page:Jaurès - Histoire socialiste, V.djvu/481

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Paris furent, après un court séjour à l’Abbaye, enfermés, le 15 messidor (3 juillet), au Temple. Tromelin, dont on finit par se méfier simplement comme serviteur pouvant favoriser l’évasion de son maître, fut expulsé et embarqué, le 4 thermidor an V (22 juillet 1797), pour l’Angleterre. Il en revint secrètement et, avec l’aide de certains royalistes, notamment Le Picard de Phelyppeaux, un complot fut organisé ; un faux ordre de transfert présenté par deux faux officiers leur livra, le 5 floréal an VI (24 avril 1798), les deux prisonniers anglais qui réussirent à gagner Londres. Phelyppeaux était un ancien condisciple de Bonaparte à l’École Militaire ; ayant patriotiquement accepté l’uniforme et les gros appointements de colonel du génie anglais, il avait accompagné devant Acre, avec son ami de Tromelin, le Commodore Sidney Smith ; et ces royalistes, ces catholiques, aussi bons serviteurs de la patrie française que leurs coreligionnaires, allaient diriger les travaux de la défense contre l’armée française au profit de l’Angleterre ; M. de Tromelin, d’ailleurs, dont le patriotisme et le royalisme s’adaptaient complaisamment à ses intérêts, devait plus tard, sur sa demande, être nommé par Bonaparte, devenu empereur, capitaine et puis général ; quant à Phelyppeaux, il mourut d’un coup de soleil, le 1er mai, avant la levée du siège d’Acre.

Les opérations du siège commençaient le 30 ventôse (20 mars) avec de petits canons, la grosse artillerie transportée de Damiette par mer ayant été capturée l’avant-veille par les Anglais. Un assaut tenté le 8 germinal (28 mars) échoua. On apprit, en outre, par le fils d’un cheik ami, l’approche de deux corps turcs venant l’un de la région de Naplouse et l’autre de Damas. Bonaparte expédia dans ces deux directions Murat et Junot à la tête chacun d’une petite colonne. Celle de Murat atteignit d’abord Safed, puis poussa jusqu’au pont d’Yakoub, sur le Jourdain, un peu au sud du lac de Houleh ; mais, l’ennemi restant très éloigné, elle revint sur ses pas et, le 15 germinal (4 avril), était de retour devant Saint-Jean-d’Acre. Celle de Junot, après avoir été bien accueillie à Nazareth et s’être avancée vers le lac de Tibériade (l’ancienne mer de Galilée), eut à lutter, le 19 germinal (8 avril), à Loubia, village à l’ouest du lac, contre des forces très supérieures en nombre ; elle parvint cependant à résister et à regagner Nazareth dont le nom allait être donné au combat qu’elle venait de soutenir : « Cette désignation quelque peu arbitraire paraît avoir été choisie par Bonaparte pour frapper les imaginations »(Revue d’histoire rédigée à l’état-major de l’armée, n° de janvier 1904, p. 64, note, étude de C. de La Jonquière).

Bonaparte ordonna le lendemain (20 germinal-9 avril) à Kleber de se porter au secours de Junot. L’avant-garde était le soir même à Nazareth, où Kleber arriva le lendemain. Le 22 (11 avril), il se porta au-devant de l’ennemi installé à Chagarah, position entre le lac de Tibériade et Gana qui est un village au nord-est peu éloigné de Nazareth ; il le repoussa vers le Jour-