Page:Jodelle - Les Œuvres et Meslanges poétiques, t. 2, éd. Marty-Laveaux, 1870.djvu/310

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Accompagnant ſon inſtrument
Des diuins accords de ſa bouche,
Prend ſoudain l’arc d’argent, & va
Chaſſer dans vn bois ſolitaire,
Ou bien quelque monſtre deſſaire,
Ainſi que Python tua.
Comme ce celeſte ſonneur
Ie ſonnoy d’vn grand Dieu les gloires,
Et de mon Roy l’heur & l’honneur,
Attendant ſonner les victoires
Tant d’vn tel Dieu que d’vn tel Roy,
Sur ceux qui leuent leur audace
Contre eux : mais ie ſens d’vne Chaſſe
L’ardeur ores bouillir dans moy.
Dés l’autre iour l’humeur m’en print,
Sire, enſuiuant ton aſſemblee,
Et depuis l’ardeur qui m’éprint
Eſl touſiours en moy redoublee,
Non pas pour ſeulement queſter
Beſles ſauues, noires, ou autres,
Qui repairent aux ſoreſts noſtres,
Mais pour d’autres monſtres domter.
Sans enſuiure pourtant ce Dieu
Chaſſeur, & Harpeur, & ſans prendre
Au lieu de ma Lyre vn épieu,
I’aime mieux ma Lyre retendre,
Et ſur elle chanter ſi bien
La chaſſe qu’ores ie proiette,
Que meſme à l’œil ie te la mette
Pour le proffit & plaiſir tien.
Car en tout ce que i’ay vouloir
(Sire) de rechercher ou ſaire,
De dire, eſcrire, ouïr, & voir,
La ſin qui ſeule m’en peut plaire,
C’eſt d’y pouuoir auecq’plaiſir
Prendre vn proffit d’eſprit enſemble :
Car quand ce double fruit ſ’aſſemble,
C’eſt le but parſait d’vn deſir.