Page:Jolimont - Les mausolées français.djvu/12

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la colère du cruel Achille n’intimide point sa vieillesse, il pénètre dans la tente du farouche vainqueur et le supplie de rendre à ses larmes les restes inanimés de son fils Hector[1] ; la pieuse Antigone, bravant une mort certaine et les ordres inhumains du roi Créon, met toute sa gloire à donner la sépulture aux membres déchirés de l’infortune Polynice[2] : combien de traits aussi touchants ne pourrions-nous pas citer encore ?

Le principe qui dicta la loi d’épargner à la sensibilité le hideux spectacle de la décomposition physique des corps humains ou de leur honteux abandon, fit naitre aussi le besoin de consacrer à leur dépôt des lieux particuliers : les uns furent destinés aux sépultures communes, soit dans l’intérieur de vastes souterrains comme les catacombes ; soit en plein air, et on les appelait alors champs de repos : les autres étaient réservés aux rois, aux personnages de distinction, ou appartenaient aux familles riches ; et ces lieux mortuaires étaient presque toujours situés hors les villes, sur le bord des routes, dans la campagne ou dans les jardins. L’antiquité la plus reculée nous en offre de nombreux exemples : Abraham, dit l’Écriture, acheta un champ pour y rendre à Sara sa femme les derniers devoirs, et y établir la sépulture de sa famille[3]. Jacob fit jurer à son fils qu’il l’ensevelirait dans le tombeau de

  1. Homère, Iliade, 24.
  2. Sophocle, Antigone, acte 2.
  3. Gen., ch. 23, v. 17.