Page:Jorga - Histoire des roumains et de leur civilisation, 1920.djvu/106

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le Danube serbe, en s’emparant, pendant l’hiver, de la citadelle de Chabatz, et il avait dirigé contre les Turcs de Bosnie des bandes sauvages, conduites par Vouk Brancovitsch et par Vlad l’Empaleur, celui-ci étant déjà désigné comme futur prince de Valachie à la place des deux Basarab, dont l’un continuait à être un ennemi et l’autre ne pouvait pas devenir un auxiliaire. Etienne devait donc résister tout seul à cette seconde invasion ottomane, qui, ayant pris le prince valaque pour guide, se dirigea sur la rive droite du Séreth, probablement pour pouvoir surveiller aussi les mouvements des Hongrois, nouveaux alliés du Voé-vode. Ce fut seulement dans les grandes forêts du Neamt que la résistance moldave put s’organiser. Mais les Tatars dévastaient déjà à l’Est le territoire de la principauté, et il fallut permettre aux paysans d’aller défendre leurs foyers menacés. Les boïars seuls étaient restés autour du prince, à côté de la troupe permanente. Ils livrèrent une grande bataille moderne, sans aucun mélange d’éléments ruraux ; ce fut l’artillerie supérieure du Sultan qui décida, après un combat acharné, au cours duquel Mohammed lui-même, déjà vieilli et perclus, se vit obligé de se mettre à la tête des janissaires qui reculaient devant la poussée opiniâtre des Moldaves. Sur les bords du « Ruisseau Blanc », de la Valea-Alba, dans la clairière où fut bâti ensuite le beau monastère dit de Razboieni, du « village de la bataille », la noblesse moldave, victorieuse sur tant de champs de bataille, fut fauchée, le 26 juillet 1476. Les Turcs, qui amenaient avec eux un prétendant, le fils même de Pierre Aaron, atteignirent Suceava, qui fut incendiée.

La Moldavie n’était pas cependant pareille à ces royaume des Balcans où une seule grande victoire et surtout la conquête des places fortes décidaient du sort de la guerre et de l’État lui-même. Les forêts profondes,