Page:Jorga - Histoire des roumains et de leur civilisation, 1920.djvu/129

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à étudier les formes différentes des ornements de ces vêtements, ainsi que des lignes qui se détachent sur les tapis de fabrication domestique et les contours des ustensiles et la poterie populaire ; à constater enfin l’aspect des champs labourés, on a, de la Theiss à la mer Noire et du Ténare au Tatra et au Bechkides, l’impression de se trouver sur un même territoire de civilisation rustique. Cette impression sera confirmée si l’on écoute les chants mélancoliques de la doïna roumaine, les accents vivaces qui incitent les danseurs de la hora, si l’on suit les mouvements d’enlacement, de trépidation sur place, d’élégant défilé de cette danse ; enfin si l’on prête l’oreille aux récits en prose de ces basme, de ces povesti, dont la lointaine origine doit être cherchée dans les fables de l’Asie indienne, riche en fantaisie et en enseignements moraux ; si l’on se pénètre du sel de ces facéties qui animent les soirées populaires des sezatori, où les fuseaux déroulent le fil ténu du chanvre et du lin ; si l’on assiste aux processions des rois mages avant Noël, aux vœux présentés sous les fenêtres spécialement éclairées du village par les enfants qui viennent célébrer, en chantant, les « fleurs blanches », la naissance du Seigneur ; aux farces bruyantes et triviales du moyen âge, qu’on rencontre, pour la Nouvelle Année, déjà dans le Durostorumdu moyen âge ; si l’on se pénètre des coutumes, des cérémonies touchantes qui accompagnent la fête de Pâques, bien que cette grande fête chrétienne soit restée étrangère aux vieux décor de l’époque païenne. L’influence romaine sur ce fond thrace primitif fut profonde. Le vocabulaire roumain ne peut renseigner là-dessus que d’une manière bien insuffisante, car un grand nombre des notions désignées par des termes d’origine latine étaient indubitablement déjà connues par les indigènes avant la première apparition des émigrés italiens, d’autant plus avant l’œuvre accomplie par les