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dans des propositions qui marquent l’hypothèse ou dans des propositions exclamatives.

Ex. :

Qui donc odist Monjoie demander,
De vasselage li poüst remembrer. (Rol., 1182.)
Si quelqu’un avait entendu ce cri de Monjoie, il aurait pu avoir une belle idée du courage.
Qui lui veïst Sarrasins desmembrer,
De bon vassal li poüst remembrer. (Rol., 1970.)
Si quelqu’un lui avait vu démembrer les Sarrasins, il aurait pu se représenter un bon vassal.
Qui puis veïst Roland et Olivier
De lor espées et ferir et chapler ! (Rol., 1680.)
Ah ! Si on avait vu Roland et Olivier frapper de leurs épées !

Même en dehors de ces cas, qui, employé comme pronom absolu, avec un sens indéfini, peut être traduit par si on, comme dans l’expression moderne : tout va bien, qui peut attendre.

Ex. :

Dieus, come est biaus, qui l’a bien regardé ! (Huon de Bordeaux, 3414.)
Dieu ! comme il est beau, pour celui qui l’a bien regardé, si on le regarde bien.
De noz aveirs ferons granz départides
La main menude, qui l’almosne desidret. (Alexis, 523.)
De nos biens nous ferons de grandes et nombreuses distributions, si quelqu’un désire l’aumône.

Cet emploi de qui, du moins avec un conditionnel, est resté très vivant jusqu’au xvie siècle et on en trouve des exemples au xviie[1].

Qui seroit contraint d’y vivre, on trouverait moyen d’y avoir du repos. (Malherbe, II, 373.)
  1. Cf. Haase, Synt. fr., § 40.