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son origine (plus-que-parfait du subjonctif en latin), le rôle de conditionnel passé et était même d’un emploi très fréquent dans ce sens.

Ex. :

Qui lui veïst Sarrazins desmembrer ! (Rol., 1970.)
Qui l’aurait vu démembrer ainsi les Sarrasins !
La veïssiez la terre si jonchiée ! (Rol., 3388.)
Là vous auriez vu la terre si jonchée !
Ki pois veïst les chevaliers d’Arabe ! (Rol., 3473.)
Celui qui aurait vu ensuite les chevaliers d’Arabie !
Ne fust la coife de son hauberc treliz,
De ci es denz li eüst le brant mis. (Raoul de Cambrai, G. Paris, Chrest., v. 63.)
Si ce n’eût été[1] la coiffe du haubert tressé, il lui aurait enfoncé sa lame jusqu’aux dents.
Ja de lour vuel de lui ne dessevrassent. (Alexis, 585.)
Jamais, de leur propre volonté, ils ne se seraient séparés de lui.
Ha ! Fine amor, et qui pensast
Que cist feïst vers moi desroi ? (Chastelaine de Vergi, 784.)
Ah ! parfaite amour[2], qui aurait cru que celui-ci me serait infidèle ?

L’imparfait du subjonctif s’emploie avec le même sens dans les propositions subordonnées.

Ex. :

Mais co’st tels plaiz dont il volsist neient. (Alexis, 49.)
Mais c’est un accord dont il n’aurait nullement voulu.

Infinitif

L’infinitif peut être employé en fonction de substantif, sujet d’une phrase, et dans ce cas il prend s, signe du cas-

  1. Cf. la tournure moderne : n’eût été.
  2. Amour était du féminin dans l’ancienne langue.