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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


des trépignements de joie », exploitées contre tout le corps d’officiers. — Et c’était vrai, mais ce l’était seulement de quelques-uns, nullement des principaux artisans de la Revision ; ils n’avaient ni séparé la justice de l’armée, ni attendu Cochin pour rompre avec Gohier, royaliste et catholique de la veille, et pour répudier Hervé. — Cochin conclut qu’il aurait pu voter la réintégration de Picquart, si Picquart avait été seulement le soldat qui, ayant découvert un crime judiciaire, « s’est efforcé de le faire reconnaître » ; mais Picquart est aussi « le rédacteur de l’Aurore, l’auteur d’articles dirigés contre ses camarades et ses chefs » ; Cochin ne contribuera point à le nommer général.

Ce brillant, cet astucieux discours, sous sa feinte bonhomie, fut interrompu à chaque instant par les gauches. Elles virent le jeu, crièrent à Cochin que « la campagne contre certains bandits de l’armée n’avait pas été une campagne contre l’armée[1] », que l’Église[2], « tout au moins le parti clérical[3] », n’avait point arrêté « de prêcher la culpabilité de Dreyfus », et que le crime commis contre un officier innocent « était le plus odieux de tous ceux qui avaient été tentés contre la conscience humaine[4] ». Barthou, du banc des ministres, renouvela la protestation de Poincaré et la sienne : aucun de leurs collègues de 1894 n’avait connu, à l’époque, « le crime abominable » de Mercier[5], la communication des pièces secrètes en de-

  1. César Trouin.
  2. Coutant.
  3. Guillemet.
  4. Chéron.
  5. Barthou et ses collègues l’avaient connu seulement pendant le ministère Méline. (Voir t. II, 326, conversations de Gribelin, de Picquart avec Lebon ; 354, l’article de l’Éclair, 377, ma lettre du 15 septembre 1896 à Darlan, et 427, la brochure de