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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


qui était distinct du dossier d’espionnage[1], à Cavaignac ; le ministre de la Guerre invita Picquart à l’étudier[2] : convenait-il d’accepter la décision de la justice civile, ou fallait-il soulever le conflit[3] ? La Libre Parole avait mené quelque tapage au sujet de l’affaire, à cause du Juif qui s’y trouvait impliqué[4].

Picquart envoya Henry plusieurs fois à Nancy pour y prendre sur place les informations utiles[5] ; puis, entre deux voyages, il l’aboucha avec Leblois[6]. Ils tinrent plusieurs conférences, dont l’une fort longue dans le cabinet d’Henry[7]. Finalement, Leblois se mit d’accord avec Henry, opina que Boulot n’avait pas de complices civils et que, dès lors, le fourrier appartenait à la justice militaire.

Picquart, sans passer par Gonse[8], transmit directement cet avis à Cavaignac, qui le ratifia. Tous les ac-

  1. Cass., II, 162 ; Instr. Fabre, 93, 149, Picquart ; 122, Leblois ; 142, Henry. Selon Henry, les deux dossiers étaient sensiblement les mêmes. Gonse, qui convient de n’avoir pas vu le dossier d’information (170), dit qu’il comprenait les indications les plus secrètes (36).
  2. Cass., II, 162 ; Instr. Fabre, 74, Picquart.
  3. Instr. Fabre, 154, Leblois.
  4. Il s’appelait Maurice Lévy-Mayer. Drumont l’accusa d’avoir détourné Boulot de ses devoirs. Quand Lévy fut reconnu innocent et mis en liberté, la Libre Parole l’annonça en troisième page, et ne parla plus du sergent-major, dont elle ne relata même pas la condamnation. (Bernard Lazare, 2e mémoire, 11.)
  5. Instr. Fabre, 51, Henry ; 74, Picquart ; 154, Leblois.
  6. Mars 1896.
  7. Procès Zola, I, 227, Leblois. — Henry nie avoir jamais conféré, dans son cabinet, avec Leblois. Celui-ci décrit la pièce. Henry dit que l’avocat y sera venu en son absence, puis qu’il ne se souvient plus (I, 227 et suiv.). D’ailleurs, Henry convient des conférences, mais les place dans le cabinet de Picquart. (Procès Zola, I, 228 ; Instr. Fabre, 52.)
  8. Instr. Fabre, 74, Picquart ; 170, Gonse.